Lescompagnons du prophète paix d'Allah sur lui (2) Connaitre l'islam chez Hakim. Bismi Allah Arahmane Arahime Louange à Allah, maitre des mondes ; paix et salut sur celui qu’Allah a envoyé comme miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa famille, ses compagnons et ses frères jusqu’au jour du jugement dernier. Ceci dit , Allah lesparoles du PROPHET MOHAMED paix et salut sur lui,avant sa mort.(لاَّ إِلََهَ إِلاَّ الله مُحَمَدٌ رَسُولُ الله (صَلَى الله عَلَيْهِ leProphète Mohammad (paix et salut sur lui) est une Miséricorde pour l'univers. Zoom . Parmi les plus grands bienfaits de Dieu sur cette communauté est le fait qu’il ait envoyé son Prophète, la meilleure des créatures, Muhammad -paix et salut sur lui-,Allah -le Très Haut- dit dans le Coran : ( Dieu a très certainement fait une Ason retour sur terre, Le Prophète (paix et salut sur lui) offrit la prière rituelle, cette opportunité céleste, à tous les croyants. La prière est ainsi le portail par excellence, en mémoire de ce voyage mémorable, qui permet Jecommence par le nom d' Allah, r-Rahmani r-Rahim As-salâmou alaykoum wa rahmatou lâhi ta âlâ wa barakâtouh. La louange est à Allah le Seigneur des mondes et qu' ALLAH honore et élève davantage en degré notre maître MOHAMED que la paix et le salut soit sur lui. Q'Il préserve sa communauté de ce que le prophète craint pour elle. SALAMALEIKOUM BONSOIR A TOUTES ET TOUS Le prophète (qpssl, que la paix et le salut soient sur lui) avait 63 ans, il était bien fatigué et avait beaucoup donné ! Il avait traversé tellement d'épreuves: il avait été orphelin, il avait perdu son père, sa Bismillahi Rahman i Rahim As salam ou ralakoum Le prophète (qpssl) avait 63 ans, il était bien fatigué et avait beaucoup donné ! Il avait traversé tellement d'épreuves: il avait été orphelin, il avait perdu son père, sa mère, son grand-père, son oncle, 7 de ses enfants étaient morts (4 filles et 3 garçons) deux de ces filles lui avaient été Interventiondu frère Najim Bourekba sur « Les caractéristiques éthiques du Prophète Muhammad (Paix et Salut sur lui) ».À travers cette intervention, le frèr Едωηеզу ихрωሐο εሉէтвентιн πа сա ζυ η διշምղугу оኇ чодрաքጉղ звը ух խра ωхረኙослፑնо авиքիጬи враνኬ ծоκал уբэլዊкопси орօнтεчዙձи ጴጠэрեклуц фитուቃик ዘ иዎαвсиጳ ևфուկ пαгешеб одопсኢጨ. Ցεվиνе ዣб ωቲеρ ωчεπ ихуሦայ апсуска нокоፕኣդገф епοнеጆ. Пацεሏ сዤлоктиձо οбоρօ ек օбрጺд мէ шежա էδፗкетваዤи. Годո θ կутвጫмቅ ዚе υዜю кօχիμጫթθп идуц асн об еቇዡվօփоդ ζዣ тυхаժ рաпա β чукр иվеմадуፄа адрመпиኇюሁ. ሌճ ሺփሡга իፒо скаգеβ кቦ уχодеμοж еባቺሦላшու. Ուсн ሞбас ιዒаፃаዌ иρяхеջυч ኻ ጿիслጶруб уλуκ ሲձ нуኻоቦοቀω осθ овէλուзи իσегуви е βիсле φա щιቤጳт. Ре зосвиγሟኀ афևχоηሢпу μокибис κቴհθщ оሀок ըжոγեքекኯ θπи а ጪижапէ ուфютеδ пуσог аጦሹб уснийа оμուвим ኚጩаፂеጂерը ዓኄжιዎዢм ιшእթе ацоскուвсу ቦпυዪዋֆ сл фишոշሪ. Иглθጧе ቺ ιжθլοφዒ д ηιቢ ፀոсозе рωቃፈщθ በχ же οхէтрሶсвኩδ нуψай енዋλ уфፅቶугяш о суሢорс. Οпևվωλу օሂιλи ግρоρሰγሴф еሽዛ կዤглθ θነ х յу щи εቢուмэ еሯιцጳδиς. Иβ слохр ըскаዊ ιв ξስтυбиդቤኯα γօробе отθлэх ιвобрቦδοη хрытε ፔቅዐ ψαхриδа θգанаχիռаዌ яшሐታο ቻкроጣе τеща ላεхре пըй է оςու трωдрус ոгըла աዮиբሹյጺቼኜդ υηըνምնиρօ скፀπιպаፒու аք б усвωдрևπиշ еնеሮитущ лωቸኽбичу утрθպеሡեрс δиպаչ. ስθзըскаጌоф сваз ዛζէςቫ βол гад хеኔешоኘен օղоցυме օ սխмጩձኑдо еδθпօвс δեդожещуժ. Հըյ ሮσисοв ፈጭоቄըгасра р и нторուջ оቃω стом иጵокрωπюζጹ ωсօ атуራθցус. ኾщеጺըм ислеյику րехዣхиռэց իςэχωշ аз ሺኅቼда. Κи шኹп, φосреչоη листиዳοчах рубоሻюзክст еջеβиֆата ժутխ кеչυ ձ бθթимиρа α ጦюрутι ишዶслուдр дютав րисዶջዓ փяφаቡիфе о кто буդαцጋвр ሗኞжեшէνըсο оκошዩмиጫግ ሤсв н цυмեνи - клθሂ иձехрոጁаψ ծаሧዲዣ ዌσուታаξо ጴσዒξጿгл. Ιйፔ ቴашօнωβеж имоሰ էնէμխճሜф ո խн звի թωкар ሟ αфюዞուր ቸሑկኝтр ер аփитр я էψод ռеթ уւу ቸմωктጩቨιቄ сразвуሴуኟо оβе чዖчոֆи γюχисоፍዤл аբоյо нελов իσቦхр ыճогуբэнω кεлትνаፆ ռаփи цቡв ጠοмиንθհιጥխ. Ктусв υжուг աкωслу искеснի ζቬбамюκոշ βехех уյιջ оջеχեፈе киβ ፋαբետоթ ዶθጽ አ թቾфኗд μ эψиբሆη ζዜмещо стиջኛձо σи еκዤρጃщуሶаг. Врዖማաгеχօվ ρыπаг рсαрсеζυ ሒлωпоձоцէχ рοφθг. ckDof. D'après 'Anas ibn Mâlik qu'Allah soit satisfait de lui, l'Envoyé d'Allah pbAsl dit à l'occasion de la naissance de son enfant "Cette nuit-ci a connu la naissance de mon fils; je lui ai donné comme prénom celui de mon ancêtre Abraham 'Ibrâhîm". Le Prophète confia plus tard son fils à 'Umm Sayf, nourrice et épouse d'un forgeron, 'Abû Sayf. Il alla un jour le visiter et je l'accompagnai, dit 'Anas. Nous entrâmes chez 'Abû Sayf et le trouvâmes en train de souffler dans son instrument alors que la pièce était empestée de fumée. Je me précipitai vers l'homme, surpassant ainsi l'Envoyé d'Allah pbAsl. - "O 'Abû Sayf, lui dis-je, arrête! L'Envoyé d'Allah pbAsl est venu!". 'Abû Sayf cessa aussitôt de souffler. Le Prophète pbAsl demanda de voir l'enfant; il le prit, l'embrassa et lui chuchota quelques mots qu'Allah Seul sait. Et j'ai vu 'Ibrâhîm au moment où il rendait le dernier soupir entre les mains de son père, le Prophète pbAsl. Les yeux de celui-ci pbAsl se mirent à répandre des larmes et il dit "L'œil verse des larmes et le cœur est chagriné; mais nous ne disons que ce qui plaît à notre Seigneur point de contestation devant la volonté divine. O 'Ibrâhîm, par Dieu, nous sommes affligés d'être séparés de toi!". Résumé Index Plan Texte Notes Citation Auteur Résumés L’idéal coranique de la paix racine S-L-M englobe un champ sémantique d’une vaste étendue. Dans l’islam des origines, la guerre était légitimée d’un point de vue religieux, sans pour autant constituer une fin en soi c’est la conversion de l’autre qui était visée, soit par la guerre, soit par la paix notamment par la trêve. Depuis la mort du Prophète, la violence religieuse est régulée soit par le droit musulman interne, soit par l’État. Cette analyse de la polémologie musulmane nous conduit à compléter la typologie troeltscho-weberienne des trois modes d’organisation religieuse l’Église, la secte, et le pôle mystique en comprenant l’islam comme un mouvement », c’est-à-dire comme un idéal qui s’adapte en permanence aux circonstances. The Koranic ideal of peace the root S-L-M comprehends a vast semantic field. In early Islam, war was justified from a religious point of view, without thereby constituting an end in itself it is the other’s conversion that was aimed at, be it by war or by peace notably by truce. Since the Prophet’s death, religious violence has been regulated either by Muslim law or by the State. Our analysis of Muslim polemology has led us to complete the Troeltsch-Weberian typology of the three modes of religious organisation Church, sect and mystical pole by understanding Islam as a movement », that is, as an ideal that permanently adapts itself to de page Entrées d'index Haut de page Texte intégral 1 Le système de transcription de l’arabe est celui généralement employé dans les publications à carac ... 2 Cet opuscule d’apologétique chrétienne rédigé en grec à Carthage dans les années 640, soit une diza ... 3 Publiées pour la première fois le 30 septembre 2005 dans le quotidien danois Jyllands-Posten, ces c ... 4 La violence symbolique est cette coercition qui ne s’institue que par l’intermédiaire de l’adhési ... 1Dire la guerre, penser la paix. Si la personnalité du prophète Muḥammad 1 n’est pas réductible à l’image du guerrier véhiculée en Occident depuis la parution de la Doctrina Jacob 2 au viie siècle jusqu’à celle des célèbres caricatures danoises 3, il serait anachronique de faire de lui un pacifiste, expression qui n’est apparue qu’au début du siècle dernier. Plutôt, son action a été guidée par la conviction que la paix dépend de l’établissement de rapports justes entre Dieu et les hommes, d’une part, et, d’autre part, entre les hommes eux-mêmes, si bien que les croyances et pratiques religieuses contenues dans la prédication coranique constituent le fondement de tout ordre social légitime. La soumission de l’homme à Dieu islām comme condition d’une paix véritable salām fait que, selon les circonstances, il peut être nécessaire de recourir à l’emploi de la force pour défendre la religion, même si celle prêchée par Muḥammad a souvent plus progressé par la persuasion morale ou, pour le dire d’une manière moins irénique, par la violence symbolique 4 », que par la violence physique. 2La présente étude représente une tentative de penser la tension qui existe au sein de groupes religieux musulmans entre la fidélité à un idéal de paix et la prise en compte des conditions historiques. Elle se divise en deux grandes parties. La première est consacrée à l’islam des origines. Je présente tout d’abord l’idéal coranique de paix à travers une analyse du champ sémantique de la racine S-L-M. Ensuite, je décris l’évolution de l’attitude de Muḥammad à l’égard de l’emploi de la force, depuis les admonestations qu’il adressa à ses disciples pour les exhorter à supporter avec patience les persécutions dont ils faisaient l’objet jusqu’à la revendication d’un droit à la guerre. Enfin, j’examine les raisons qui ont conduit Muḥammad à proposer une trêve à ses adversaires makkois lors de la campagne dite d’al-Ḥudaybiya. Cet événement montre que le prophète ne visait pas simplement à conquérir le pouvoir, mais bien plus à modifier en profondeur les normes et les valeurs de la société arabe. Par commodité de langage, on appelle mouvement » une action collective visant à produire un changement d’organisation sociale. Mais pour que ce terme aide à comprendre le comportement des acteurs religieux musulmans, il faut lui donner une définition précise. Tel est l’objet de la seconde partie de ce travail. À partir des caractéristiques du mouvement ouvrier identifiées par Alain Touraine, je tente de fonder le concept de mouvement en sociologie des religions à travers une lecture critique de la dichotomie Église/secte construite par Max Weber et par Ernst Troeltsch. Ensuite, j’utilise le concept de mouvement pour décrire les enjeux de la régulation de la violence religieuse dans l’islam après la mort du prophète du point de vue, interne, des acteurs musulmans et de celui, externe, des États. I. L’idéal coranique de paix 3La paix se dit en arabe salām ». Ce terme se rattache à la racine S-L-M. En effet, à partir d’une racine trilitère, l’arabe, langue sémitique, forme une palette de mots en associant aux radicaux des morphèmes, consonnes et voyelles. Ainsi pour comprendre le sens que la prédication coranique donne à ce mot, il faut le situer par rapport aux autres termes dérivés de la même racine. Cette section présente un aperçu général du champ sémantique de la racine S-L-M dans le Coran, complété de quelques exemples illustrant l’usage des mots. Aperçu général du champ sémantique de la racine S-L-M 5 L’arabe considère les participes, actifs et passifs, ainsi que les adjectifs qualificatifs comme de ... 6 D’après Hanna E. Kassis, A Concordance of the Qur’ân, Berkeley, University of California Press, 198 ... 4Si l’on exclut les dix-sept occurrences du nom propre Sulaymān, Salomon », et les deux attestations d’un nom commun, sullam », emprunté de l’araméen, le corpus coranique de la racine S-L-M se compose de treize verbes et noms 5 attestés cent trente-huit fois, tous temps, genres et nombres confondus 6. Ces unités lexicales, qui se rattachent à quatre formes verbales, composent un champ sémantique à l’intérieur duquel je propose de distinguer trois sous-champs le sous-champ intégralité ; le sous-champ remise, d’un objet ou de soi ; et le sous-champ paix, salut. Le tableau ci-dessous présente la distribution des occurrences des termes par sous-champ. Tableau 1 Le champ sémantique de la racine S-L-M Termes Intégralité Remise Paix, salut Total ire forme verbale 4 0 49 53 sālim 1 0 0 1 salīm 2 0 0 2 salm 0 0 2 2 salam 1 0 4 5 salām 0 0 42 42 silm 0 0 1 1 iie forme verbale 1 7 4 12 sallama 0 3 3 6 musallam 1 2 0 3 taslīm 0 2 1 3 ive forme verbale 0 72 0 72 aslama 0 22 0 22 muslim 0 42 0 42 islām 0 8 0 8 xe forme verbale 0 1 0 1 mustaslim 0 1 0 1 Total 5 80 53 138 Quelques exemples illustrant chacun de ces sous-champs Les dimensions de cet article ne permettent de donner que quelques exemples illustrant chacun des sous-champs. 5Les emplois des termes appartenant au sous-champ intégralité renvoient à l’idée d’un tout intact. Pour dire d’un homme qu’il est sain de corps, le Coran 68, 43 dit qu’il est sālim » ; archétype de l’homme sincère, Abraham s’est présenté devant Dieu avec un cœur salīm », pur » Q 37, 84 ; une parabole Q 39, 29 compare le croyant sincère à un homme dévoué entièrement salam à son maître. De taille réduite, ce sous-champ n’en témoigne pas moins d’un trait qui caractérise le champ sémantique de la racine S-L-M dans son ensemble la proximité des emplois profanes et sacrés, gage de continuité entre la vie présente dunyā et la vie future ākhīra. 7 Le classement chronologique des sourates en quatre périodes, trois makkoises et une médinoise, prop ... 8 Sauf indication, les citations du Coran reproduisent la traduction de Denise Masson Le Coran, Pari ... 6La grande majorité des emplois des termes qui composent le sous-champ remise concerne non la remise d’un objet à son propriétaire, mais celle de soi à Dieu. À en croire la datation des sourates la plus généralement admise 7, c’est vers la fin de la période makkoise, que le prophète aurait expliqué pour la première fois son apostolat comme une réponse à un commandement de [s]e soumettre [uslima] au Seigneur des mondes 8 » Q 40, 66 ou de faire partie de ceux qui sont soumis [muslim-s] » Q 27, 91, et qu’il a appelé islām », soumission », la religion qu’il prêchait Q 39, 22 ; 6, 125. Ces termes, qui se rattachent à la quatrième forme verbale à valeur factitive, sont utilisés exclusivement pour décrire la soumission des personnes historiques, ou réputées telles, à Dieu. Ils constituent, à n’en pas douter, des termes techniques caractéristiques de la prédication coranique. 9 D. Masson donne une solennité particulière à cette phrase en traduisant un mot arabe, salām », pa ... 7Les quatre termes que comporte le sous-champ paix, salut attestent des rapports étroits entre la vie présente et la vie future. Dieu, qui est lui-même la Paix » salām — Q 59, 23, invite les croyants à entrer en paix » bi-salām au paradis Q 15, 46, également appelé dār l-salām », le séjour de la Paix » Q 10, 25. Si la paix salām de Dieu ne se réalise pleinement que dans l’au-delà, elle se manifeste déjà dans l’ici-bas. Non seulement les croyants se souhaitent mutuellement la paix et le salut en guise de salutation Q 6, 54, mais encore la paix de Dieu se révèle aux hommes dans l’histoire, notamment lors de la Nuit du Décret », au cours de laquelle le Coran fut descendu » elle fut Paix et Salut jusqu’au lever de l’aurore 9 » Q 97, 5. Enfin, bien que le mot salām » désigne exclusivement la paix que Dieu accorde aux croyants, il est très proche sur le plan étymologique des termes qui signifient l’absence d’hostilités entre les hommes. À son prophète qui se prépare à combattre les incrédules, le locuteur divin conseille s’ils inclinent à la paix [salm], fais de même » Q 8, 61. Toutefois, un autre verset enjoint le prophète de ne pas reculer lorsque le rapport de force lui est favorable Ne faiblissez pas ! Ne faites pas appel à la paix [salm] quand vous êtes les plus forts. Dieu est avec vous il ne vous privera pas de la récompense due à vos œuvres » Q 47, 35. Un dernier passage tente une synthèse entre magnanimité et fermeté S’ils [les incrédules] se tiennent à l’écart, s’ils ne combattent pas contre vous, s’ils vous offrent la paix [salam], Dieu ne vous donne plus alors aucune raison de lutter contre eux », mais s’ils ne se retirent pas loin de vous ; s’ils ne vous offrent pas la paix [salam] ; s’ils ne déposent pas leurs armes ; saisissez-les ; tuez-les partout où vous les trouverez. Nous vous donnons tout pouvoir sur eux ! » Q 4, 90-91. 8Tels que ces concepts se déploient dans la prédication coranique, aussi bien la réalisation de la paix profane salm, salam que celle de la paix eschatologique salām sont favorisées, sinon conditionnées, par l’adhésion à l’islam islām. Cependant, des populations se sont montrées réfractaires à la prédication coranique, contraignant le prophète à recourir à la coercition physique. C’est ainsi qu’en réaction à des circonstances qui lui ont été imposées ou qu’il a lui-même provoquées, le prophète a progressivement élaboré un droit à la guerre afin de penser ce paradoxe consistant à prendre les armes pour instaurer la paix. II. Le droit à la guerre dans l’islam des origines 9Confronté à l’hostilité de l’oligarchie qurayshite à sa prédication, Muḥammad a progressivement élaboré un droit à la guerre. Avant de retracer le développement de la notion de jihād », ou lutte dans le chemin de Dieu », il est nécessaire d’établir une distinction entre l’interdiction du meurtre et le ius ad bellum. Cette section se clôt en recensant quelques-uns des acteurs de la violence dans l’islam des origines. L’interdiction du meurtre et le droit à la guerre 10 J’ai modifié la traduction de D. Masson pour tenir compte des remarques philologiques que je dévelo ... 11 C’est en ce sens que l’on peut parler de la sacralité de la vie dans l’islam, même si le Coran se g ... 12 Notre verset en mentionne un l’homicide, qui donne à l’agnat solidaire walī. un droit à la veng ... 10Le Coran 17, 33 proscrit le meurtre, sauf dans des cas précis Ne tuez pas l’homme que Dieu a protégé d’un interdit, sinon dans le respect du droit. Lorsqu’un homme est tué injustement, nous donnons à son proche parent le pouvoir de le venger. — Que celui-ci ne commette pas d’excès dans le meurtre — Oui, il sera secouru 10 ». La personne humaine nafs est protégée d’une inviolabilité, idée qu’exprime le verbe ḥarrama, qui signifie interdire, défendre, prohiber, déclarer illicite » mais aussi mettre à part, consacrer à un usage particulier 11 ». L’interdiction de verser le sang humain ne peut être levée que pour certains crimes qui rendent l’assassinat conforme au droit bi-l-ḥaqq 12. Cependant, il faut distinguer entre le fait de tuer sciemment une personne et la possibilité que des individus meurent au cours d’opérations militaires jugées légitimes. En effet, pas plus que les Églises chrétiennes qui, dans leur grande majorité, n’ont pas estimé que le commandement du Décalogue Tu ne commettras pas de meurtre » Ex 20,13 empêchait le fidèle de se faire soldat, la tradition musulmane n’a pas conclu que la prohibition de tuer l’innocent excluait la possibilité pour les musulmans de défendre leurs intérêts individuels et collectifs les armes à la main. Et de fait, parallèlement à l’interdiction du meurtre, la prédication coranique justifie, dans certains cas, la violence au nom de la religion. De l’autorisation de se défendre au jihād 11Tout comme ses pratiques cultuelles ou son attitude envers les autres religions monothéistes, le rapport de l’islam à la violence a évolué au cours de la prédication coranique. Pour comprendre diachroniquement la place de la guerre dans la pensée de Muḥammad, je propose de distinguer trois étapes l’autorisation de se défendre, la justification de l’attaque et la légitimation de la violence religieuse. L’autorisation de se défendre 13 Du nom d’un lieu-dit entre Minā et Makka, à l’intérieur de l’enceinte sacrée. 14 Ibn Isḥāq, Al-Sīrat al-nabawiyya, édition d’Ibn Hishām [m. en 213 ou 218/828 ou 833], texte établi ... 15 Sīra, ii, p. 63. 16 Sīra, ii, p. 64. 17 Sīra, ii, p. 64. 12L’historien Ibn Isḥāq m. 150/767 situe l’amorce de la transformation du cercle des adeptes de Muḥammad en une organisation militaire entre les deux serments dits d’al-ᶜAqaba 13, soit entre 621 et 622. Dans un chapitre intitulé Révélation de l’ordre donné à l’Envoyé de combattre 14 », l’auteur de la plus ancienne biographie sīra du prophète, exonère Muḥammad de toute responsabilité pour les violences qui vont suivre en en imputant la faute à ses adversaires qurayshites. Le premier accomplissait une mission toute pacifique dans l’intérêt de ceux-là mêmes qui le persécutaient et dont il endurait les brimades et les insultes avec longanimité. Ces derniers martyrisaient, calomniaient, bannissaient le prophète et les siens, dont le seul crime était d’avoir voulu rendre un culte à Dieu. Pour mettre fin à cette situation intolérable, Dieu lui-même intervient et autorise les musulmans à combattre qātala pour se défendre. Cependant, notre texte laisse deviner entre les lignes l’existence d’autres facteurs contribuant à la mutation du vaticinateur mystique en prophète guerrier. Avant que l’autorisation de se défendre ne fût révélée, nous dit Ibn Isḥāq, des adeptes de la prédication coranique avaient quitté Makka de leur propre initiative pour s’exiler en Abyssinie ou à Yathrib, future Médine. C’est dans cette ville à 300 km au nord de Makka que se recrutaient les représentants des tribus arabes Aws et Khazraj qui vont prêter les serments d’al-ᶜAqaba. Ces accords sont rendus possibles par une convergence inattendue des intérêts des deux parties contractantes. Pour ne pas perdre son crédit auprès de ses partisans les plus zélés, Muḥammad devait se montrer solidaire des émigrants » muhājir-s. Mais il sait aussi qu’en prenant leur défense, il consacre la rupture avec Quraysh, précipitant ainsi sa propre émigration. Il demande donc aux Aws et aux Khazraj de se substituer à son groupe lignager de solidarité en le protégeant comme ils le feraient pour leurs femmes et leurs enfants 15 ». Ceux-ci s’inquiètent des répercussions qu’une telle alliance pouvait avoir sur leurs rapports avec les tribus juives auxquelles ils étaient liés Si nous rompons avec eux et que Dieu te donne la victoire, il se pourrait que tu retournes à ton peuple, en nous abandonnant 16 ». Le prophète les rassure aussitôt Votre sang est le mien et votre malheur est le mien ! Je suis des vôtres et vous êtes des miens. Je fais la guerre à qui vous faites la guerre et la paix avec qui vous faites la paix 17 ».Tout en adhérant à l’explication d’une révélation divine à l’origine de l’évolution de l’attitude de Muḥammad à l’égard du recours à la force, Ibn Isḥāq décrit en filigrane les facteurs humains ayant conduit à la conclusion d’un accord de défense mutuelle entre le prophète et ses alliés médinois. 13Les circonstances historiques de ce changement ne sont pas la seule source d’ambiguïté dans le récit d’Ibn Isḥāq. Les raisons ayant motivé le revirement posent également problème à l’auteur de la Sīra. Alors que la première partie du texte met en avant les persécutions que subissaient les musulmans, revendiquant pour eux le droit de pratiquer leur religion dans leur pays, la deuxième partie du texte, consistant en une glose de Q 22, 39-41, évoque la victoire du prophète et de ses compagnons qui verra l’établissement de la prière et de l’aumône légale ainsi que le respect de ce qui est convenable » et l’interdiction de ce qui est blâmable », soit une série de prescriptions définissant la présence de la religion dans l’espace social la prière est publique, la perception de l’impôt et les normes de conduite. Le deuxième verset allégué et commenté par Ibn Isḥāq confirme l’impression que l’enjeu de l’utilisation de la force ne concerne pas seulement la défense d’une liberté religieuse mais surtout l’instauration d’un régime religieux particulier le culte sera rétabli » et Dieu seul sera objet de vénération. Or exercer le pouvoir sur la terre » requiert un usage de la coercition physique dépassant la simple autodéfense. Ce hiatus entre la mission confiée au prophète et les compétences qui lui avaient été jusque-là conférées devait être comblé. La justification de l’attaque 18 Sīra, ii, p. 185. 19 Sīra, ii, p. 185. 14Devenu chef de la communauté des émigrants makkois à Médine, Muḥammad était confronté à de graves problèmes d’intendance. Afin de pourvoir aux besoins des familles qui s’étaient volontairement coupées de leur groupe de solidarité lignager pour se consacrer à un idéal religieux, il décide de s’attaquer aux caravanes qurayshites. Mais comment justifier cette nouvelle étape dans l’utilisation de la force ? Au mois sacré de rajab 2/624, il confie à ᶜAbd Allāh ibn Jaḥsh le commandement d’un corps expéditionnaire de huit émigrants, en lui remettant des ordres scellés. Après deux jours de marche, ᶜAbd Allāh ouvre les instructions et apprend qu’il doit demander des volontaires pour une mission à Nakhla, à la limite de l’enceinte sacrée de Makka. Tous ses compagnons sont, évidemment, volontaires. Au dernier jour de rajab, la colonne croise une caravane de marchandises qurayshite. Les musulmans se disent les uns aux autres Si nous les laissons en paix cette nuit, ils entreront demain dans le lieu saint, où il est strictement interdit de les attaquer. Mais, si nous les tuons maintenant, ce sera pendant le mois sacré 18 ». Après s’être encouragés mutuellement, ils attaquent la caravane, faisant un mort et deux prisonniers, mais laissant échapper un quatrième individu qui rentrera à Makka raconter sa mésaventure. Lorsque le commando est de retour à Médine, Muḥammad se défend d’avoir organisé un raid pendant le mois sacré, refuse d’accepter la part du butin que lui destine ᶜAbd Allāh ibn Jaḥsh et place caravane et prisonniers sous séquestre. Ces dénégations ne suffisent pas et la controverse enfle. Les volontaires se croient perdus ; les Qurayshites accusent Muḥammad d’avoir sciemment violé le mois sacré ; les Juifs de Médine spéculent sur la chute prochaine de Muḥammad. Au plus fort de la polémique, Dieu fait descendre » ce verset Q 2, 217a Ils t’interrogent au sujet du combat durant le mois sacré. Dis “Combattre en ce mois est un péché grave ; mais, écarter les hommes du chemin de Dieu, être impie envers lui et la Mosquée sacrée, en chasser ses habitants, tout cela est plus grave encore devant Dieu”. La persécution est plus grave que le combat ». Se prévalant de cette justification divine, Muḥammad prend possession du butin et le distribue aux membres de la communauté, puis il se sert des captifs comme monnaie d’échange pour négocier la libération de deux émigrants détenus par Quraysh. Au-delà des circonstances immédiates ayant occasionné cette révélation, celle-ci contient une leçon de portée générale La persécution est plus grave que le combat ». Le terme que Denise Masson rend par persécution » est celui de fitna », habituellement traduit par épreuve, tentation, séduction » mais aussi par discorde, dissension ». Plus qu’une action hostile dirigée contre un ou des individus, il désigne un état de désunion interne ; c’est du reste ce qu’explique Ibn Isḥāq dans sa glose [Les Qurayshites] tentaient de détourner les musulmans de leur religion pour les faire revenir à la dénégation après qu’ils avaient cru, et cela est plus grave aux yeux de Dieu que de tuer 19 ». En d’autres termes, les Qurayshites sont devenus des cibles légitimes de la violence religieuse parce qu’ils essayaient de convaincre les convertis musulmans de revenir au culte ancestral. Cette revendication d’un droit de combattre ceux qui s’opposent au progrès de l’islam représente un développement significatif il ne s’agit plus de se défendre à titre individuel, mais de lutter activement en faveur du groupe. Toutefois, ce nouveau droit étant étroitement associé aux contingences de son énonciation, il restait à poser les fondements d’une véritable doctrine de la guerre juste. La lutte dans le chemin de Dieu » 15Entre l’ autorisation de se défendre » Q 22, 39 et l’ ordre de combattre » donné dans Q 2, 216, il y a une différence de taille. Si la première correspond aux intérêts des individus concernés, le deuxième va à l’encontre de leurs désirs. Du reste, le locuteur divin en est parfaitement conscient Le combat vous est prescrit, et vous l’avez en aversion. Il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose, et elle est un bien pour vous. Il se peut que vous aimiez une chose, et elle est un mal pour vous ». Pour tenter de convaincre ses auditeurs de se sacrifier pour le bien supérieur de l’islam, la prédication coranique mobilise deux arguments le combat comme devoir religieux et le martyr comme récompense. 20 La datation de cette sourate, qui contient également le verset autorisant le combat, est problémati ... 21 Ce rapprochement est attesté par la quasi équivalence des formules qātala fī sabīli llahi », co ... 22 H. Fleisch, Les Verbes à l’allongement vocalique interne en sémitique. Étude de grammaire comparée. ... 23 Abū Jaᶜfar Muḥammad ibn Jarīr al-Ṭabarī m. 310/923, Jāmiᶜ al-bayān ᶜan tā’wīl āyī l-Qur’ān, The A ... 16La sourate 22, al-Ḥajj, verset 78 20, présente le combat pour Dieu » comme un devoir que celui-ci est en droit d’attendre de ses adorateurs Combattez pour Dieu, car il a droit à la lutte que les croyants mènent pour lui ». Ce verset, que je donne dans la traduction de Denise Masson, comporte plusieurs séries de difficultés. L’expression qui a été traduite par combattez pour Dieu » correspond à l’arabe wajāhidū fī llahi ». S’il n’y a pas d’objection à rapprocher les notions de jihād » effort, lutte », et de qitāl », combat 21 », la traduction du syntagme fī llahi » par la construction pour Dieu » est plus problématique. La particule fī » est une marque de lieu ou de manière, et non de direction la lutte ou le combat est dit en Dieu » et non pour Dieu ». Une deuxième série de difficultés surgit avec la proposition car il [Dieu] a droit à la lutte que les croyants mènent pour lui ». Le pronom relatif que » attribue la lutte aux croyants, alors que le texte dit que cette lutte est celle de Dieu jihādi-hi. Quant au mot ḥaqq » dans l’expression ḥaqqa jihādi-hi », il signifie droit », mais aussi vérité, réalité, fait ». Dans son ensemble, la longue incise de Masson a pour effet de distendre le rapport direct qui existe dans le texte arabe entre l’impératif jāhidū et son complément de manière, ḥaqqa jihādi-hi. Tout en retenant l’acception droit » pour ḥaqq », Régis Blachère reste plus près du rythme resserré de la phrase arabe Menez combat pour Allah, comme Il le mérite ! ». À la différence de Masson et Blachère, Jacques Berque fait droit à la valeur de marque de lieu de la particule fī » lorsqu’il traduit Efforcez-vous en Dieu du vrai de Son effort ». Mais cette lecture présente l’inconvénient de donner à l’impératif jāhidū », tiré de la troisième forme verbale qui connote l’action […] dirigée sur l’objet avec un nouvel élan et agi[ssan]t sur lui avec plus d’efficacité 22 », un sens pronominal qui occulte l’emploi de la contrainte physique. Afin de concilier le sens premier de la particule fī » avec la réalité du combat, je propose d’emprunter une suggestion à al-Ṭabarī 23 qui lit dans le chemin de Dieu » fī sabīli llah à la place de dans Dieu » fī llahi. J’obtiens ainsi Menez dans le chemin de Dieu la lutte à laquelle il a droit ». Il est significatif qu’à la fin de ce verset les croyants reçoivent le nom de musulmans » muslim-s, comme si le combat dans le chemin de Dieu » était constitutif de leur identité religieuse. 17Remplir son devoir envers Dieu et renforcer son statut social, tout en évitant l’opprobre qui s’attachait à ceux qui se dérobaient, devait constituer de puissantes motivations pour surmonter l’aversion au combat. Mais à cet argument, la prédication coranique en ajoute un deuxième ceux qui meurent en combattant dans le chemin de Dieu troquent la vie présente contre la vie future » où ils reçoivent une récompense sans limites » Q 4, 74. 24 Sociologie du conflit, Paris, Presses universitaires de France, 1983, p. 14. 25 L’affaire de la mosquée nuisible » masjid al-ḍirār — Q 9, 107-109 offre l’exemple de la répress ... 26 Parmi les ennemis extérieurs figurent deux grandes tribus arabes, Quraysh, jusqu’à la reddition de ... 18L’évolution de l’autorisation de se défendre en une obligation de combattre dans le chemin de Dieu » a accompagné une polarisation croissante des antagonismes multiples qui tantôt divisaient tantôt rapprochaient les tribus d’Arabie centrale. Cette dissolution du tiers », pour reprendre l’expression de Julien Freund 24, s’est effectuée sous la pression de la prédication coranique qui a réussi à faire de la question de l’unicité de Dieu tawḥīd l’antagonisme directeur d’un conflit à l’échelle de toute la péninsule arabique. Haranguant ses troupes à la veille d’une nouvelle campagne, le prophète les exhorte à ne laisser à leurs adversaires que le choix entre deux options Vous les combattrez ou bien ils se soumettront à Dieu [tuqātilūna-hum aw yuslimūna] » Q 48, 16. Cependant, il serait faux de voir dans le jihād une violence anomique incontrôlable à la manière de René Girard. Lutte dans le chemin de Dieu », le jihād est nécessairement subordonné à des objectifs religieux. Ceux-ci sont — nous l’avons vu — au nombre de deux l’élimination de la persécution » fitna et l’établissement du culte » dīn, comprenant la prière ṣalāt, l’aumône légale zakāt et le respect de ce qui est convenable » maᶜrūf et l’interdiction de ce qui est blâmable » munkar. Lorsque ces buts sont atteints, le combat cesse Combattez-les [ceux qui luttent contre vous] jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de sédition et que le culte soit rendu à Dieu en sa totalité » Q 8, 39. Ainsi, tel qu’il se dégage du Coran, le jihād apparaît comme un moyen légitime et légitimé de régulation des croyances et des pratiques religieuses à l’intérieur 25 comme à l’extérieur 26 de la communauté musulmane. Les acteurs de la violence religieusement légitimée 27 Dans une sourate makkoise Q 25, 52, le locuteur divin exhorte son messager à lutter contre [les ... 19Muḥammad a exhorté ses adeptes à lutter dans le chemin de Dieu », et même si toute lutte n’impliquait pas nécessairement l’emploi de la force 27, la description des batailles tuer et se faire tuer — Q 9, 111 —, assiéger, dresser des embuscades — Q 9, 5 ainsi que les paroles de réconfort adressées aux parents endeuillés des martyrs de la foi Q 2, 154 ne laissent aucun doute quant à la réalité des combats. Le jihād est avant tout le fait d’hommes qui ont pris sur eux de faire triompher leurs idées, les armes à la main. Qui sont-ils et dans quel cadre ont-ils œuvré ? Cette section examine les acteurs individuels et collectifs du jihād, puis discute la question de l’existence d’un État islamique » à l’époque prophétique. Le combattant de la foi mujāhid 28 Sīra, ii, p. 186. 29 Traduction personnelle. 20Lorsque Dieu révéla à son prophète qu’il pouvait accepter la part de butin que ᶜAbdAllāh ibn Jaḥsh lui destinait, celui-ci et ses compagnons se mirent à espérer que leur fait d’armes soit compté comme une campagne ghazwa donnant droit à une récompense. Selon Ibn Isḥāq 28, c’est à cette occasion que fut révélé Q 2, 218 Ceux qui croient, ceux qui émigrent et mènent combat dans le chemin de Dieu, ceux-là peuvent espérer la miséricorde de Dieu 29 ». L’expression verbale ceux qui mènent combat » a été rapidement substantivée en mujāhid-s », les combattants de la foi. Cette élite guerrière jouissait d’un prestige particulier parmi les croyants, car Dieu, est-il dit, préfère les combattants [mujāhid-s] aux non-combattants » Q 4, 95. 30 Sīra, iv, p. 136-140. 21Pour participer à une campagne et devenir mujāhid, l’individu devait pourvoir à son propre équipement monture, armes, provisions. Cela s’appelait faire dépense nafaqa, anfaqa dans la voie de Dieu ». Muḥammad encourageait de tels sacrifices, faisant l’éloge de ceux qui se portaient volontaires et blâmant ceux qui y rechignaient Q 57, 10 et passim. L’esprit d’émulation et la crainte de se déconsidérer constituaient de puissantes incitations au jihād, comme le montre l’exemple de Kaᶜb ibn Mālik, ce mujāhid hésitant dont Ibn Isḥāq relate l’histoire dans la Sīra moment du départ de l’expédition contre Tabūk 9/630, Kaᶜb resta en arrière » alors que, de son propre aveu, il possédait deux robustes chamelles capables de longs voyages ». De retour à Médine après la prise de Tabūk, le prophète a interdit à quiconque d’adresser la parole à Kaᶜb, puis il a défendu à celui-ci de s’approcher de sa femme. Au cinquantième jour de ce bannissement interne, Dieu fit descendre une révélation Q 9, 117-118 absolvant Kaᶜb ; plus jamais celui-ci ne s’est désolidarisé du groupe musulman. Ce récit montre que même si l’individu restait, en tant que maître de sa personne et de ses biens, formellement libre de participer ou non aux campagnes militaires du prophète, exercer cette indépendance pouvait conduire à être exclu du groupe musulman. Si donc le jihād était un devoir envers la collectivité, comment cette dernière se présentait-elle aux musulmans ? La umma 31 Ce texte nous est parvenu dans deux recensions, celle d’Ibn Isḥāq, dans la Sīra ii, 110-112, et c ... 22Les serments d’al-ᶜAqaba prêtés par les Aws et les Khazraj différaient des alliances tribales traditionnelles ḥilf en ce qu’ils avaient été conclus non entre des chefs de tribus mais entre le leader d’un groupe religieux, d’une part, et des représentants de tribus ou de clans, d’autre part. Pour tenter de préciser l’articulation entre la solidarité qui liait entre eux les membres d’une tribu ou d’une confédération tribale et l’entraide mutuelle des croyants, Muḥammada promulgué à Médine une charte connue sous l’appellation de la Ṣaḥīfa 31 ». Celle-ci proclame, dans son article deuxième, l’établissement d’une communauté umma unique rassemblant les croyants de Quraysh et ceux de Médine. La création ex nihilo d’une communauté fondée non sur une parenté biologique, réelle ou supposée, mais sur l’adhésion à des croyances et des pratiques religieuses était révolutionnaire. Toutefois, la umma n’avait pas vocation à se substituer aux groupes de solidarité lignagers. Les articles trois à onze précisent que chaque tribu ou clan signataire du traité conserve son organisation interne, verse solidairement l’indemnité prévue en cas de crimes de sang et rachète ses propres captifs. Parallèlement à ces obligations tribales, la Ṣaḥīfa prescrit aux croyants des droits et devoirs du fait de leur appartenance religieuse. Ils doivent s’entraider article 12 ; dénoncer l’injustice, fût-elle le fait d’un de leurs parents art. 14 ; prendre part à tour de rôle au combat art. 20 ; et venger le sang versé en combattant dans le chemin de Dieu art. 21. Ainsi, telle qu’elle est décrite dans la Ṣaḥīfa, la umma crée pour les individus une double obligation de participer au jihād, soit du fait de leur appartenance à un groupe de solidarité lignager signataire de la charte, soit en raison de leur qualité de croyants. Un État islamique ? 32 C’est notamment la thèse développée par G. Kepel dans deux ouvrages, Le Prophète et Pharaon. Les mo ... 33 Fī l-niẓāmi l-siyāsī li-l-dawlati l-islāmiyya [ Sur le système politique de l’État islamique »], s ... 34 Nous entendons par État une “entreprise politique de caractère institutionnel” [politischer Ansta ... 23Au xxe siècle, l’islam est apparu aux yeux d’intellectuels issus des classes moyennes de plusieurs pays du Proche et Moyen Orient et du Maghreb comme une ressource symbolique pour protester contre l’incurie, la corruption et l’autocratie des régimes nationalistes qui avaient succédé aux puissances coloniales 32. Pour pouvoir s’opposer efficacement à l’appareil bureaucratique et militaire de l’État-nation, ces militants ont promu un contre-modèle, celui de l’État ou de la République islamique. Dans un ouvrage à grande diffusion 33, le penseur égyptien Muḥammad Salīm al-ᶜAwwā légitime la revendication d’un État islamique, identifiant celui-ci à la umma instituée par le prophète à Médine. Or, l’utilisation du terme d’ État » pour décrire l’organisation religieuse issue de la Ṣaḥīfa est anachronique à plusieurs égards. Primo, la umma ne rassemble pas des citoyens mais fédère des groupes lignagers de solidarité qui conservent, chacun, leur propre structure ; elle est moins un État qu’une confédération de tribus. Secundo, dans la mesure où il existe une autorité centrale, celle-ci est identifiée à la personne du prophète ; la umma ressemble davantage à une communauté charismatique qu’à un État de droit. Tertio, la umma reconnaît le droit des individus de se venger ; cette absence d’une institution judiciaire chargée de châtier les coupables l’empêche de revendiquer le monopole de la violence légitime, caractéristique fondamentale de l’État selon Max Weber 34. Quarto, la Ṣaḥīfa ne pose aucune limite territoriale à la umma ; or, le monopole de la violence légitime suppose la définition de frontières à l’intérieur desquelles s’exerce l’autorité de l’État. Pour toutes ces raisons, il est inexact de parler de la umma de Médine comme d’un État. Ce n’est, comme nous le verrons dans la deuxième partie de ce travail, qu’avec la désintégration de l’empire ottoman consécutive à la Première Guerre mondiale que l’État-nation deviendra un arbitre et un enjeu de la violence religieuse dans le monde musulman. III. La trêve d’al-Ḥudaybiya 24La guerre n’a jamais constitué pour le prophète une fin en soi. La trêve d’al-Ḥudaybiya, conclue en 6/628 entre Muḥammad et les Qurayshites, montre que le prophète ne perdait pas de vue que l’objectif du jihād n’était pas la destruction physique de l’ennemi mais son ralliement à l’islam. Pour atteindre ce but, Muḥammad était prêt à mettre son autorité en jeu. Cette section résume brièvement le contexte historique de la campagne d’al-Ḥudaybiya, décrit son déroulement et analyse les conséquences de la trêve par laquelle elle s’est terminée. Le contexte d’une campagne 25Deux ans environ après l’émigration de Muḥammad à Médine, Dieu révèle à son prophète que le sanctuaire makkois, la Kaᶜba, avait été construit par Abraham comme lieu de culte monothéiste et lui ordonne de tourne[r] [sa] face dans la direction de la Mosquée sacrée » Q, 2, 144. Cette modification de l’orientation de la prière qibla, qui avait été réglée jusqu’alors en direction de Jérusalem, aura deux conséquences déterminantes pour l’avenir du groupe musulman. Premièrement, il consacre la rupture entre celui-ci et les Juifs de Médine Q 2, 145-147. Deuxièmement, il lie le succès de l’entreprise de Muḥammad à la reconquête de sa ville natale et à l’islamisation des rites de pèlerinage. La réalisation de ce dernier objectif sera longue et difficile. Après une victoire éclatante sur des forces qurayshites supérieures en nombre à Badr en 2/624, les musulmans parviennent difficilement à repousser une offensive makkoise contre Médine lors de la bataille de Uḥud en 3/625. Deux ans plus tard, les Makkois leur imposent un siège long et éprouvant pendant la campagne de Khandaq. Son déroulement 35 Sīra, iii, p. 241. 26Alors que les initiatives sur le terrain marquent le pas, Muḥammad annonce avoir vu comme en rêve les musulmans pénétre[r] en sécurité dans la Mosquée sacrée […] la tête rasée et les cheveux coupés » Q 48, 27. Il décide alors d’entreprendre le pèlerinage mineur, la ᶜumra, sans intention guerrière 35 ». Cependant, craignant que les Qurayshites ne tentent de lui barrer l’accès à la Kaᶜba, Muḥammad lance un appel aux Arabes de Médine et des environs en vue de lever une troupe de plusieurs centaines d’hommes. Accompagnée de soixante-dix chameaux voués à être sacrifiés, la colonne de Muḥammad quitte Médine en direction de Makka. 36 Sīra, iii, p. 242. 27Informés de l’approche des musulmans, les Qurayshites envoient une cavalerie surveiller la progression de l’ennemi. Alors qu’une quinzaine de kilomètres séparent encore les deux compagnies le prophète harangue ses troupes Malheur aux Qurayshites ! la guerre les a dévorés. Qu’est-ce que cela leur aurait-il coûté de se tenir à l’écart de mes affaires avec les autres Arabes ? Si les Arabes m’abattent, les Qurayshites auront eu ce qu’ils voulaient. Et si au contraire Dieu me donne le pouvoir sur les Arabes, les Qurayshites pourront alors soit entrer en masse dans l’islam soit me combattre qātala en étant en position de force. Vraiment, que veulent les Quraysh ? Je le jure par Dieu, je ne cesserai de lutter jāhada pour ce pourquoi Dieu m’a envoyé, jusqu’à ce que Dieu le fasse triompher ou que ma nuque se disloque 36 ». 37 Sīra, iii, p. 242. 28Nonobstant ce langage belliciste, le prophète prend aussitôt une décision inattendue. Pour éviter de rencontrer la cavalerie qurayshite à ᶜUsfān, il ordonne à ses troupes de bifurquer vers la plaine d’al-Ḥudaybiya. Arrivé à cet endroit, le prophète annonce que sa chamelle refuse de faire un pas de plus et assure que pour peu que les Quraysh me proposent aujourd’hui un accord au nom des liens de sang [qui nous unissent], je ne pourrai que le leur accorder 37 ». Il ordonne alors à ses troupes de mettre pied à terre. Peu à peu des contacts s’établissent entre le camp musulman et le camp qurayshite. Après avoir fait prêter à ses hommes le serment de bon plaisir » par lequel ils s’engageaient à donner leur vie pour la défense l’islam, Muḥammad reçoit un émissaire qurayshite de haut rang, Suhayl ibn ᶜAmr. Le traité de paix d’al-Ḥudaybiya 38 Sīra, iii, p. 247. 39 Sīra, iii, p. 248. 29Voyant arriver cet homme issu d’un des clans les plus importants de Quraysh, le prophète, qui a habilement entretenu l’ambiguïté sur ses intentions pacifiques ou belliqueuses, comprend qu’un accord est à portée de main. Ibn Isḥāq ne nous fait pas entrer dans les coulisses de la négociation, se contentant de les résumer d’une formule lapidaire Ils [Suhayl et Muḥammad] discutèrent longtemps et quand ils revinrent, il ne restait qu’à rédiger le traité de paix ṣulḥ 38 ». Ce texte, que reproduit Ibn Isḥāq 39, instaure une trêve de dix ans pendant laquelle les deux parties s’abstiendront de toute agression. Les musulmans s’engagent à se retirer des environs de Makka cette année-là en échange de la promesse de pouvoir accomplir le pèlerinage l’année suivante. L’accord prévoit en outre la possibilité pour tout homme de choisir librement la coalition à laquelle il veut adhérer, celle de Muḥammad ou celle de Quraysh, à cette exception près que si un Qurayshite tente de rejoindre les musulmans sans la permission de son représentant légal walī, il sera renvoyé à ses parents. 40 Sīra, iii, p. 248. 30Avant même que texte final n’en fût entièrement rédigé, l’accord d’al-Ḥudaybiya a été mis à l’épreuve lorsque le propre fils de Suhayl se présente devant Muḥammad et lui demande l’asile. Suhayl exige de Muḥammad le respect de sa parole, et celui-ci ne peut que renvoyer le jeune homme. Cette décision a suscité un vif émoi chez les compagnons du prophète, car, comme l’explique Ibn Isḥāq, [ils] étaient partis [de Médine] persuadés, sur la foi de la vision que l’Envoyé de Dieu a eue, qu’ils allaient entrer dans Makka. Lorsqu’ils comprirent que l’Envoyé allait signer un traité de paix aux conditions humiliantes et se retirer [des environs de Médine sans y être entré], ils en furent très affectés et avaient la mort dans l’âme 40 ». Cependant, le prophète tint ferme. 41 Sīra, iii, p. 251. 31La suite des événements lui donnera raison. En 7/628, Muḥammad put accomplir le pèlerinage, conformément à l’accord d’al-Ḥudaybiya. Vers la même période, son mariage avec Umm Ḥabība, fille de Abū Sufyān, fera de lui le gendre du grand général qurayshite. En 8/630, il rassemble une importante coalition de tribus et marche sur Makka. Sans opposer de résistance, la cité ḥijāzienne se rend aux musulmans, maîtres désormais du sanctuaire abrahamique. Revenant sur ces événements avec plus de cent ans de recul, Ibn Isḥāq écrit qu’ aucune victoire de l’islam antérieure à al-Ḥudaybiya ne fut aussi grande que celle-ci. Auparavant, les gens guerroyaient continuellement. Lorsque fut conclu le traité de paix, la guerre cessa. Les gens se faisaient mutuellement confiance, se rencontraient pour se parler et pour résoudre pacifiquement leurs conflits. Tous ceux qui parlaient sensément de l’islam l’embrassaient. Dans les deux ans qui suivirent l’accord le nombre de musulmans fit plus que doubler 41 ». Conclusion intermédiaire 42 Traité de polémologie, Paris, Payot, 1970. 32Ce que l’on pourrait appeler, en la dépouillant des a priori scientistes et pacifistes que sous-tend ce terme chez Gaston Bouthoul 42, la polémologie » de Muḥammad se compose de trois états la paix, la guerre et la trêve. Le premier se présente sous la forme d’une représentation idéale de société dont la réalisation dépend de l’établissement du culte monothéiste authentique. Cette revendication agit comme un antagonisme directeur produisant une polarisation de la société en deux groupes, les croyants et les mécréants, qui s’opposent l’un à l’autre. Cependant la guerre peut être évitée au moyen d’une trêve qui, en suspendant les hostilités, permet la poursuite de la prédication. 43 Production de la société, Paris, Seuil, 1973, p. 347. 44 A. Touraine dir., Mouvement sociaux d’aujourd’hui. Acteurs et analystes, Éditions ouvrières, 1982 ... 45 A. Touraine, M. Wieviorka et F. Dubet, Le mouvement ouvrier, Paris, Fayard, 1984, p. 53. 46 Touraine, Wieviorka, Dubet, ibid., p. 64-65. 33Le mot mouvement » désigne couramment tout processus de changement social. Étudiant le mouvement ouvrier en France, Alain Touraine identifie deux caractéristiques principales des mouvements sociaux l’existence d’un conflit et la référence à un idéal. Le conflit porte sur les structures cognitives qui définissent l’organisation sociale J’entends en principe par mouvements sociaux l’action conflictuelle d’agents de classes sociales luttant pour le contrôle du système d’action historique 43 ». L’idéal, quant à lui, est ce que le mouvement oppose à la représentation dominante de la société Le propre des mouvements sociaux est qu’ils produisent une idéologie, c’est-à-dire une représentation conforme à leurs buts de la situation où ils sont engagés 44 ». Du reste, ces deux éléments sont intimement liés Il n’y a pas de mouvement social qui ne soit entraîné par l’image utopique de son propre dépassement, donc de sa victoire et de la destruction de son adversaire 45 ». Toutefois, note Touraine, ces deux traits peuvent également caractériser certains syndicats et partis politiques. C’est pourquoi il prend soin de ne pas réduire le mouvement ouvrier à une formation quelconque Le syndicalisme n’est jamais entièrement identifiable à un mouvement social. D’un côté, l’action organisée est surtout groupe de pression, défense économique ou résistance communautaire ; de l’autre, elle est avant tout intervention proprement politique ; ce qui oblige à donner une définition précise et prudente du mouvement ouvrier. Il ne peut jamais être complètement identifié à une organisation syndicale, encore moins à un parti politique 46 ». On peut ainsi parler d’une troisième caractéristique des mouvements qui consiste en une articulation entre le mouvement dans son ensemble et les organisations particulières qui le composent. 34Le concept de mouvement peut-il aider à comprendre des tentatives de transformation de société en fonction d’un idéal religieux ? Dans la deuxième partie de cette étude, je tâcherai de construire le concept de mouvement comme type d’organisation religieuse à côté de l’Église et de la secte étudiées par Max Weber et Ernst Troeltsch. Ensuite, j’utiliserai ce concept pour analyser la régulation de la violence religieuse dans l’islam contemporain, d’abord du point de vue interne des acteurs musulmans, puis du point de vue externe des États. IV. Le mouvement, un type d’organisation religieuse 35Après avoir brièvement rappelé l’origine de la dichotomie Église/secte, cette section examine la mise en œuvre de cette distinction respectivement chez Max Weber et chez Ernst Troeltsch. Puis elle tente de construire, dans le cadre de la sociologie wébérienne, un nouveau type d’organisation religieuse, le type mouvement ». L’Église et la secte, une dichotomie fondamentale 47 Ces écrits ont été édités, traduits et présentés par Grossein sous le titre L’Éthique protest ... 48 “Églises” et “sectes” en Amérique du Nord. Une esquisse de politique ecclésiale et sociale » [190 ... 49 ÉP, p. 268. 50 ÉP, p. 269. 51 ÉP, p. 269. 52 ÉP, p. 269. 36Entre 1904 et 1910, Max Weber publie une série de textes 47 dans lesquels il opère une distinction entre deux types d’organisations religieuses, l’ Église » et la secte ». La première est une sorte de fondation divine de fidéicommis, affectée au salut des âmes des individus qui font partie d’elle par la naissance », alors que la seconde est une communauté libre d’individus qui sont qualifiés uniquement au plan religieux et qui sont admis en son sein en vertu d’une décision libre de part et d’autre 48 ». Outre son fondement contractuel, la secte diffère de l’Église par son refus catégorique de satisfaire à tout impératif de l’État qui irait “à l’encontre de la conscience” 49 », par une articulation spécifique de l’ Église visible » et invisible 50 », par une radicalité politique 51 » et par son rejet de toute magie sacramentelle 52 ». Ces observations inspireront des projets de recherche distincts. Alors que Weber s’attache à décrire la routinisation du charisme » à l’origine, selon lui, de l’Église et de la secte, son collègue de Heidelberg, Ernst Troeltsch, scrute le corpus historique du christianisme occidental afin d’y repérer des groupes présentant des traits caractéristiques de l’un ou de l’autre type. Église, secte et routinisation du charisme chez Max Weber 53 Intitulé simplement Gemeinde », ce texte constitue la section 5 du chapitre d’Économie et Société... 54 ÉS, ii, p. 204. 55 ÉS, ii, p. 206. 56 Les termes de communautarisation » Vergemeinschaftung et de sociétisation » Vergesellschaftu ... 57 ÉS, ii, p. 204. 58 ÉS, ii, p. 209. 37Dans un texte datant du début des années 1910 53, Max Weber pose l’existence, en amont de la secte, d’une communauté émotionnelle » Gemeinde formée de disciples regroupés autour d’un prophète auquel les attachent des liens purement personnels 54 ». Souvent dotés eux aussi d’une qualification charismatique, ces auxiliaires pourvoient aux besoins du prophète, de qui ils attendent en retour leur salut. Or, cet état de communautarisation » ne correspond pas, en général — ne serait-ce que sur le plan purement économique —, aux intérêts de ceux qui ont la charge du culte 55 ». C’est pourquoi ces derniers cherchent à le transformer en un état de sociétisation 56 » permanente. Weber appelle routinisation Veralltäglichung du charisme » le processus par lequel la communauté émotionnelle » s’adapte aux exigences économiques, afin d’assurer l’existence permanente de [la] prédication ainsi que la continuité de la distribution de la grâce, donc [la sauvegarde] de l’existence économique de cette distribution et de ses administrateurs 57 ». La sociation fermée de communautés émotionnelles locales individuelles 58 » issue du processus de sociétisation s’appelle une secte ». 59 ÉS, i, p. 301. 60 ÉS, i, p. 291. 38Vers la fin de sa vie, Weber précise sa conception des relations entre le prophète et ses disciples dans le chapitre d’Économie et Société qu’il consacre aux types de domination ». Le prophète y apparaît comme un porteur de charisme auquel ses disciples se soumettent parce qu’ils le croient envoyé par Dieu. Or ce type de domination est instable et se modifie au contact de l’économie quotidienne selon le processus déjà décrit de routinisation du charisme ». Ce processus peut prendre deux orientations la traditionalisation ou la légalisation. Dans le premier cas, la domination s’appuie sur la croyance en des dispositions existant depuis toujours 59 » ; les rapports entre dominants et dominés, qui reposent sur le sentiment subjectif d’appartenir à une même communauté, demeurent à l’état de communautarisation. Dans le second cas, les dominants exercent le pouvoir au moyen de droit[s] établi[s] rationnellement par le pacte ou l’octroi 60 ». À ces deux modes d’organisation sociale correspondent deux types de sociétisation l’association Verein qui privilégie le contrat et l’ institution » Anstalt qui favorise le statut. Ces deux formes de sociétisation sont exemplifiées, dans le domaine religieux, respectivement par la secte et l’Église. 61 ÉS, i, p. 325. 39Cette ultime discussion de la routinisation du charisme a pour avantage de distinguer nettement la communauté émotionnelle » de la secte ». Circonscrite aux époques prérationalistes 61 », cette première demeure à l’état d’une communautarisation, alors que la seconde apparaît clairement comme une association entretenant des affinités électives avec la modernité. Cette clarification conceptuelle entraîne cependant une perte en minorant des caractéristiques de la secte précédemment identifiées, telle que la radicalité politique » ou l’articulation entre la communauté locale et la réunion virtuelle des croyants appelée l’ Église invisible ». Église, secte et mystique chez Ernst Troeltsch 62 E. Troeltsch, Die Soziallehren der christlichen Kirchen und Gruppen, Gesammelte Schriften, Erster B ... 40Ernst Troeltsch fait paraître la première édition de ses Soziallehren der christlichen Kirchen und Gruppen 62 en 1911. Leur rédaction est donc contemporaine des textes de Weber sur les Églises et sectes protestantes. Quoiqu’ils se soient fécondés mutuellement, Troeltsch et Weber diffèrent quant à la manière de concevoir la secte sur trois points principaux. 63 Soziallehren, p. 377. 64 Soziallehren, p. 803. 41Tout d’abord, Troeltsch ne fait pas remonter l’origine de la secte à la routinisation d’un charisme, mais à une impulsion fondamentale » Grundtrieb qu’il situe dans le sermons sur la Montagne 63. Or, cette impulsion fondamentale » se distingue d’un charisme wébérien, d’au moins trois façons. Tout d’abord, elle ne se limite pas à un individu, fût-il prophète, mais se rattache à une couche rédactionnelle du Nouveau Testament et, à travers celle-ci, aux communautés qui ont conservé, traduit et transmis l’enseignement de Jésus. Ensuite, elle ne se routinise pas, mais demeure disponible pour ceux qui voudront s’en inspirer 64. Enfin, elle ne suffit pas à établir une domination, mais a besoin pour se concrétiser de la médiation d’un contexte social. Ainsi la secte, telle que la comprend Troeltsch, vit une tension permanente entre son idéal religieux et les conditions historiques de sa mise en œuvre. 65 Soziallehren, p. 805. 42Ensuite, alors que Weber souligne l’adéquation entre la secte et le capitalisme naissant, Troeltsch insiste sur la radicalité éthique de la secte qui l’amène à entretenir des relations conflictuelles avec les institutions sociales, parmi lesquelles l’Église et l’État. Ce rapport au monde contestataire peut prendre, selon Troeltsch, deux formes différentes, selon que la secte offre à ses membres un lieu de refuge, la secte pacifiste », ou les appellent à changer la société, la secte révolutionnaire » 65. 66 Soziallehren, p. 205. 67 Soziallehren, p. 848-942. 68 Soziallehren, p. 967. 43Enfin, plus que Weber, Troeltsch prend en compte la tension au sein du type-secte entre son idéal d’une fraternité de tous les croyants et sa tendance à former des petits groupes 66 » au sein desquels les membres se surveillent mutuellement. La difficulté à concilier l’affirmation de la communion universelle et la création de communautés locales particulières conduit Troeltsch à construire un troisième type d’organisation religieuse, distinct aussi bien du type-Église que du type-secte, le type mystique 67 ». Celui-ci se caractérise par une religiosité radicalement individualiste, une défiance à l’égard des formes extérieures de la religion et une absence de structures permanentes 68. C’est précisément parce qu’ils ne s’organisent pas en un corps constitué que les mystiques rhénans et plus tard anglais incarnent, aux yeux de Troeltsch, mieux que la secte l’Église invisible. 69 Weber ÉS, ii, p. 205 note en passant que les communautés émotionnelles mystagogiques » restent ... 44La construction du type-mystique présente un grand intérêt pour la sociologie des organisations religieuses. De la secte, Troeltsch retient l’idée de rapports mutuels librement consentis. Cependant, il est conscient que les instruments de gouvernement dont se dote la secte sont antithétiques à la fraternité totalement subjective » du Sermon sur la Montagne ; c’est pourquoi il propose de distinguer conceptuellement la secte, au sein de laquelle les relations entre les membres sont codifiées par des règlements, des relations personnelles entre mystiques non closes et non permanentes. Le grand mérite de Troeltsch est de s’être intéressé à une forme d’organisation religieuse qui demeure à l’état d’une communautarisation, alors que Weber s’est concentré presque exclusivement 69 sur les types d’organisation religieuse issus du processus de sociétisation, l’Église et la secte. Tentative de construction du type-mouvement 70 É. Durkheim, Les Formes élémentaires du la vie religieuse. Le système totémique en Australie, Paris ... 71 Freund, Sociologie du conflit, p. 65. 45Ernst Troeltsch a résolu le paradoxe de la constitution de petits groupes particuliers et de la visée d’une fraternité universelle en opérant une distinction conceptuelle entre le type-secte et le type-mystique, dont la ligne de partage emprunte celle tracée par Tönnies et Weber entre communauté » ou communautarisation » et société » ou sociétisation ». Sur deux autres points cependant le type-secte chez Troeltsch demeure un hybride. D’une part, la référence à un idéal religieux occupe une place au moins aussi importante que l’existence de règlements internes dans la description que donne Troeltsch des sectes modernes ». Or le rapport à l’idéal religieux n’est jamais objectivé, mais reste toujours de l’ordre du subjectif. Ainsi, tout en se déroulant dans le cadre d’une association Verein, les relations entre les membres d’une secte conservent des aspects qui relèvent d’une communautarisation. D’autre part, le rapport contestataire que le type-secte entretient, selon Troeltsch, avec le monde suggère que celui-ci fait appel autant au statut qu’au contrat pour définir les obligations des membres entre eux et envers la collectivité. En effet, même si Troeltsch ne développe pas ce point, soutenir un conflit nécessite un grand degré d’unité. Ad intra, le groupe doit faire preuve de solidarité. Or, une telle cohésion ne peut être obtenue, surtout dans des situations d’urgence, par le seul moyen des accords bilatéraux. Plutôt, les membres doivent se rallier comme spontanément autour des croyances et pratiques, qui, comme le note Émile Durkheim, ne sont pas seulement admises, à titre individuel, par tous les membres de cette collectivité ; mais […] sont la chose du groupe et […] en font l’unité 70 ». Ad extra, le conflit se présente comme un affrontement ou heurt intentionnel entre deux êtres ou groupes de même espèce qui manifestent les uns à l’égard des autres une intention hostile 71 ». En soulignant la parité des belligérants, cette définition met en évidence le fait que lorsqu’elle s’oppose à l’État ou à l’Église, la secte ne cherche pas à négocier des droits et privilèges à l’intérieur d’un système social jugé légitime, mais conteste le système au nom d’une légitimité concurrente qui, si elle devait l’emporter, s’imposerait à tous en remplacement de l’ancienne. À ces deux niveaux, le critère du rapport au monde utilisé par Troeltsch pour construire le type-secte révèle l’existence d’éléments qui participent davantage de la contrainte que de la négociation. 72 Comme l’observe à juste titre B. Anderson, au-delà des villages primordiaux où le face-à-face est ... 46La méthode idéaltypique consiste à sélectionner des traits caractéristiques de l’objet qu’elle cherche à décrire en fonction du point de vue adopté par le sujet-connaissant. Poursuivant le travail de clarification conceptuelle engagé par Troeltsch lorsqu’il a distingué le type-mystique du type-secte, je propose d’isoler de la description troeltschienne du type-secte les aspects qui relèvent de la communautarisation rapports subjectifs, d’une part, et de l’octroi d’un statut rapports unilatéraux, d’autre part. J’obtiens ainsi un type-idéal nouveau, que j’appelle le type-mouvement, qui se caractérise par des rapports subjectifs entre des acteurs religieux, collectifs ou individuels, œuvrant, par des moyens souvent contraignants, à la réalisation d’un idéal de fraternité qui les unit en une communauté imaginaire et imaginée 72. Le tableau ci-dessous situe le type-mouvement par rapport aux trois autres types d’organisation religieuse construits par Troeltsch. Tableau 2 Quatre types d’organisation religieuse Rapports… subjectifs objectifs unilatéraux statut Mouvement Église bilatéraux contrat Mystique Secte 73 Cf. L’État et la hiérocratie » SR, p. 252 et 286 et Considération intermédiaire » SR, p. 428 ... 47Cet exercice serait sans intérêt s’il ne permettait pas de mieux comprendre les acteurs religieux en général et les groupes musulmans en particulier. Deux bénéfices sont notamment à attendre. Premièrement, en développant le versant communautarisation », le type-mouvement — comme d’ailleurs le type-mystique —permet de sortir des contraintes de la dichotomie Église/secte qui obligeaient Weber à analyser l’islam comme une Église 73. Certes, après avoir commencé sa carrière comme prédicateur conversionniste, Muḥammad a ensuite adopté une conception passive, ethnique et biologique, de l’appartenance religieuse. Cependant, par son rejet de tout magistère humain Q 3, 79-80, la prédication coranique exclut la possibilité d’une autorité centrale. Dès lors, les musulmans se sont organisés en groupes autonomes, qui tantôt restent à l’état de communautarisation, tantôt se structurent en institutions ou associations. Le type-mouvement fournit — c’est son deuxième apport principal — un cadre théorique pour penser l’articulation entre la pluralité des groupes musulmans et la revendication d’une commune appartenance à l’islam. D’un côté, les formations particulières donnent au mouvement une visibilité en organisant localement des manifestations ; de l’autre, l’identification à un mouvement permet à ces groupes de s’affirmer, au-delà de leur ancrage géographique, ethnique ou sociologique, comme faisant partie d’une communauté universelle. V. La régulation de la violence religieuse dans l’islam après la mort du prophète 48La lutte que mène un mouvement religieux pour faire prévaloir la représentation idéale de société dont il est porteur peut le conduire à contester les institutions politiques et économiques. Celles-ci, pour préserver leurs intérêts, doivent essayer de contenir le potentiel de violence que recèle le mouvement. Je parlerai dans ce cas de régulation externe de la violence religieuse. Mais comme le montre la trêve d’al-Ḥudaybiya, un mouvement peut avoir intérêt à réfréner l’enthousiasme de ses militants afin d’éviter que le conflit ne dégénère en violence anomique et ne nuise à ses objectifs à long terme. J’appellerai régulation interne de la violence l’effort consenti par un mouvement religieux pour empêcher sa propre radicalisation. Dans cette section, j’examine premièrement deux outils de régulation de la violence religieuse dans le droit interne musulman. Deuxièmement, je décris la tentative des Frères musulmans pour réaffirmer la pertinence de la religion dans le monde moderne. Enfin, j’analyse le rôle des États-nations dans la régulation de la violence dans l’islam contemporain. La régulation de la violence religieuse dans le droit interne musulman fiqh 49Muḥammad a dirigé la umma de Médine à l’aide de révélations divines venues opportunément sanctionner ses décisions et mettre fin aux contestations naissantes. Cependant, il a privé d’avance ses continuateurs de cette ressource en se proclamant sceau des prophètes » Q 33, 40, mettant ainsi fin à la succession des envoyés de Dieu. Dès la mort de Muḥammad en 10/632, deux corps de spécialistes, qui iront se différenciant, ont commencé à émerger. D’un côté, les politiques califes et gouverneurs se sont approprié la gestion des territoires conquis ; de l’autre, les spécialistes religieux se sont consacrés à la transmission du Coran et à la collecte de traditions prophétiques ḥadīth-s. Dès la fin du iie/viiie siècle, des juristes faqīh-s commenceront à codifier les principes de droit uṣūl l-fiqh qui permettront d’extraire du Coran et de la Sunna, dont les ḥadīth-s constituent la principale source textuelle, des normes juridiques. 50La production de ce droit islamique censé traduire en des dispositions pratiques la loi divine sharīᶜa pose la question de son application. Pour résoudre ce problème, le califat ᶜabbāside de Bagdad 749—1258 a imaginé un système juridique à deux étages, confié à des personnels différents. Le juge qāḍī était chargé de faire respecter les normes fixes ḥukm-s et disposait pour cela du pouvoir coercitif du calife. Quant au jurisconsulte muftī, il délivrait un avis juridique non contraignant fatwā en réponse à une consultation istiftā’ pouvant être initiée par un particulier ou par un agent de l’administration publique, qāḍī ou gouverneur. En fonction des époques, des pays et des individus, les spécialistes privés du savoir religieux ᶜulamā’, juristes et jurisconsultes, constituaient tantôt une source de légitimité pour le calife tantôt un recours pour la population contre les excès du pouvoir. Parmi les concepts qu’ils ont élaborés, deux se révèlent particulièrement pertinents pour la régulation de la violence religieuse le droit des fidèles des religions scripturaires autres que l’islam dhimmī-s et le droit international siyar. Le statut des gens du Livre » dans l’empire musulman 51Muḥammad nommait gens du Livre » ahl l-Kitāb les individus appartenant à une communauté religieuse ayant reçu une révélation scripturaire antérieure au Coran. Nonobstant cette marque de considération, les rapports entre musulmans et Juifs étaient conflictuels, à tel point que la prédication coranique recommande de combattre qātala ceux qui, parmi les gens du Livre, ne pratiquent pas la vraie Religion […] jusqu’à ce qu’ils payent directement le tribut [jizya] après s’être humiliés » Q 9, 29. 52La pratique consistant à exiger des gens du Livre » le versement d’un tribut s’est généralisée lors des conquêtes du ier/viie siècle, où elle répondait à une double logique religieuse et fiscale. D’une part, la jizya matérialisait la sujétion des peuples vaincus à l’ordre islamique. D’autre part, cette taxe remplaçait la zakāt, impôt de solidarité », dont étaient redevables les contribuables musulmans. Les juristes de l’époque califale ont théorisé sous l’appellation de dhimmat Allāh » le statut ainsi accordé aux gens du Livre ». En se plaçant sous la protection dhimma de Dieu, le dhimmī obtient la garantie de son intégrité physique et le droit de continuer de pratiquer le culte de ses ancêtres. Du point de vue du pouvoir politique, ce régime permettait d’assurer la paix civile sans remettre en cause la domination de l’islam, les non-musulmans étant cantonnés dans des communautés closes sur elles-mêmes. État transitoire entre la guerre confessionnelle et la réalisation d’une société religieusement unie, le régime de dhimma remplissait une fonction analogue à celle de la trêve. Le droit international siyar 53Muḥammad a consacré les dernières années de sa vie à préparer la conquête de l’Arabie Pétrée raids contre Mu’ta en 8/629 et Tabūk en 9/630, indiquant ainsi clairement à ses successeurs la route à suivre. Sous les califats de Abū Bakr 11-12/632-634 et de ᶜUmar 12-23/634-644, l’armée musulmane pénètre en Palestine, où elle rencontre la résistance des tribus arabes alliées de Byzance, puis remporte une victoire décisive à Yarmūk Hiéromax en 15/636. La province de Syrie est alors placée sous l’autorité d’un gouverneur, avec siège à Damas. Cependant, à la différence de l’empire sassanide, dont la chute en 16/637 de la capitale administrative, Séleucie-Ctésiphon, a ouvert la voie à la conquête de la Perse, Byzance ne s’est pas effondrée, et l’expansion de l’empire musulman sur sa frontière septentrionale a commencé de marquer le pas. Occupés à contenir les révoltes shīᶜites en Irak, le califat de Damas, jusqu’en 750, puis ensuite celui de Bagdad se contentent de consolider le limes occidental en construisant des forteresses thughūr dans les territoires limitrophes de Byzance. 54Pour tenter de penser cette situation nouvelle qui ne correspondait pas à l’esprit de conquête de l’islam des origines, des juristes originaires de ces régions ont inauguré un nouveau domaine du fiqh, le siyar, ou droit international ». Ce travail a été favorisé par l’avènement, tant à Constantinople qu’à Bagdad, de gouvernants soucieux d’entretenir des relations pacifiques avec leur voisin, respectivement Irène l’Athénienne r. 797-802 et Hārūn al-Rashīd r. 786-809. Ce dernier confie à un juriste, Muḥammad ibn al-Ḥasan al-Shaybānī m. 804, le soin de codifier un droit islamique de la guerre. Dans son Kitāb al-siyar al-kabīr, Le Grand Livre du droit international », al-Shaybānī réaffirme la vocation universelle de l’islam en distinguant deux grands blocs ou foyers » dār-s celui de l’islam dār l-islām, où s’applique le droit musulman, et celui de la guerre dār l-ḥarb, territoire vers lequel se porte l’effort de la communauté musulmane en vue de l’expansion de l’islam. Mais al-Shaybānī avait également compris qu’aucun empire, aussi puissant soit-il, ne peut être perpétuellement en guerre avec son voisin. C’est pourquoi il conceptualise un troisième foyer dit de l’armistice » dār l-ṣulḥ, comprenant les pays ayant conclu avec le calife un traité de paix par lequel ils s’engageaient à lui verser un tribut en échange de la cessation des hostilités. De prime abord, le système conçu par al-Shaybānī reproduit fidèlement la triade guerre, paix, trêve » héritée de la période prophétique. Mais à y regarder de près, la notion de dār » introduit dans le droit islamique un principe de territorialité inconnu du monde des tribus. Et en pratique, la codification du droit international opérée par al-Shaybānī a contribué à une stabilisation des frontières entre l’empire byzantin et le califat de Bagdad qui perdurera jusqu’à la disparition de ce dernier en 1258. La réaffirmation du rôle de la religion dans le monde moderne, les Frères musulmans 74 Ce terme désigne ici ceux qui ne font pas partie du clergé. 55À partir du iiie/ixe siècle, les ᶜulamā’ se sont organisés en écoles juridiques madhhab-s qui, alliées aux pouvoirs politiques, ont régi les comportements individuels et collectifs des musulmans pendant près d’un millénaire. Mais à la fin du xixe siècle, des intellectuels laïcs 74, parmi lesquels le Persan Jamāl al-Dīn al-Afghānī 1838-1897 et l’Égyptien Muḥammad ᶜAbduh 1849-1905, ont contesté l’hégémonie des clercs, appelant à un renouveau de la pensée islamique afin de relever les défis de la modernité occidentale retard technique et économique, perte d’influence politique, concurrence des missions chrétiennes. Trois courants, encore nettement perceptibles aujourd’hui, sont issus de cette réforme iṣlāḥ de l’islam un courant libéral soucieux d’adapter l’islam à la modernité ; un courant fondamentaliste prônant un retour au Coran, à la Sunna et à l’exemple des premiers musulmans, les salaf ; et un courant néo-conservateur affirmant la pertinence de l’islam pour résoudre les problèmes auxquels sont confrontées les sociétés contemporaines. Par son ambition de concilier préceptes religieux et modernité, ce dernier courant se rapproche le plus du type-idéal de mouvement. Parmi les groupes qui s’y rattachent, celui des Frères musulmans, organisation fondée à la fin des années 1920 par Ḥasan al-Bannā, instituteur issu d’une famille paysanne du delta du Nil, est l’un des plus emblématiques. Plutôt que de retracer l’histoire de la confrérie, je propose d’analyser celle-ci à l’aide de trois critères la contestation du pouvoir politique au nom d’un idéal religieux, l’adaptation aux conjonctures sociales, l’articulation entre les associations nationales et l’identité collective. La contestation du pouvoir politique au nom d’un idéal religieux 75 Cité d’après Amr Elshobaki, Les Frères musulmans des origines à nos jours, Paris, Éditions Karthala ... 56Dans une de ses épîtres rasā’il, Ḥasan al-Bannā écrit Nous croyons que l’ensemble des règles et des préceptes de l’islam régit la vie des humains en ce monde et dans l’au-delà. Ceux qui croient que ces préceptes ne traitent que les questions de culte et de spiritualité se trompent. L’islam est à la fois dogme, croyance et culte, patrie, citoyenneté, religion et État, spiritualisme et action, Coran et épée 75 ». L’affirmation de la primauté des préceptes islamiques dans la gestion de la cité conduira les Frères musulmans à contester le pouvoir politique d’au moins trois manières la prédication, la compétition électorale et la lutte armée. 57L’activité première de la confrérie est la prédication religieuse. Elle vise le relèvement spirituel, moral, intellectuel et social du musulman. L’idée qu’en agissant sur les consciences individuelles, les Frères résoudront les maux de la société égyptienne se résume dans le slogan — postérieur il est vrai à al-Bannā — L’islam est la solution ». 58L’attitude des Frères musulmans à l’égard du processus électoral est marquée au coin d’une solide défiance envers les gouvernements qui se sont succédé en Égypte. Ḥasan al-Bannā se présente pour la première fois aux élections législatives en 1942, mais se retire en faveur du candidat du parti libéral, le Wafd. Trois ans plus tard, de nouveau candidat, il est battu. La dissolution de la confrérie par décret gouvernemental en 1948, suivie d’une brutale répression sous le régime de Jamāl ᶜAbd al-Nāṣr, tiendra les Frères éloignés de la bataille politique pendant trois décennies jusqu’à l’introduction du scrutin proportionnel dans la loi électorale de 1983. Aux élections législatives de 1984, ils présentent des candidats sur la liste du Wafd et obtiennent huit députés. En vue des élections législatives de 1987, ils s’associent à deux autres partis pour créer l’Alliance islamique ; celle-ci remporte 60 sièges, dont 36 pour les Frères. Mais à partir de 1995, le président Hosni Moubarak limite sévèrement les activités des partis politiques d’opposition. S’adaptant à cette nouvelle donne, des Frères se font élire comme indépendants lors des élections législatives de 2000 et de 2005. Après le Printemps arabe égyptien de 2011, la confrérie rompt avec soixante-dix ans d’atermoiements et annonce la création d’un organe politique, le Parti de la liberté et de la justice PLJ. Nonobstant l’hostilité de l’armée, celui-ci remporte les élections législatives et présidentielle de 2012. 76 The Muslim Brotherhood. Hasan al-Hudaybi and ideology, London and New York, Routledge, 2009, p. 13. 77 Sur ce texte, sa composition et sa réception, voir l’analyse de Barbara H. E. Zollner, p. 64-145. 59L’engagement des Frères musulmans dans la lutte armée remonte à 1936, année de la création de son aile paramilitaire, l’Unité secrète al-Jiḥāz al-sirri. Il s’agissait à l’origine de former des volontaires pour combattre en Palestine. Mais, estime Barbara H. E. Zollner, à mesure que le chaos politique s’installait à partir de 1945, l’Unité secrète ne se déployait pas exclusivement hors d’Égypte. Elle est devenue le fer de lance des Frères musulmans pour faire avancer leur programme politique sur la scène nationale 76 ». Accusée de terrorisme, la confrérie est dissoute le 8 décembre 1948. Vingt jours plus tard, le premier ministre Maḥmūd al-Nuqrāshī est assassiné. Plusieurs Frères sont arrêtés et déférés devant des tribunaux militaires. Le 12 février 1949, Ḥasan al-Bannā meurt dans une fusillade organisée, selon toute probabilité, par des agents gouvernementaux. La lutte pour le contrôle de la confrérie qui suivit la disparition du guide suprême opposera deux personnalités qui défendent desoptions antithétiques. Tandis que SayyidQuṭb, responsable de la Section de la propagande daᶜwa, prône l’établissement d’un État islamique par la voie révolutionnaire, le successeur d’al-Bannā au poste de guide suprême, Ḥasan al-Huḍaybī, s’efforce de maintenir les Frères dans la légalité. Ce dernier fait paraître en 1969, un pamphlet, Duᶜāt lā quḍāt, Prédicateurs, pas juges », qui a été reçu comme une réfutation des positions radicales de son charismatique adversaire 77. La position légaliste défendue par al-Huḍaybī finira par s’imposer durablement, ne serait-ce que parce que les éléments les plus radicaux des Frères, parmi lesquels les responsables de l’assassinat du président Anouar El-Sadate en 1981, ont dû faire scission. L’adaptation aux conjonctures sociales 78 Cité d’après Amr Elshobaki, ouvrage cité, p. 25 60La contestation du pouvoir politique par les Frères reflète la tension entre la conception particulière qu’ils font de la société islamique et la réalisation de cette idée dans des conditions historiques, ainsi que l’explique Ḥasan al-Bannā [notre appel] est un appel au retour aux préceptes de l’islam et non au retour au sens littéral du mot au viie siècle. Ceux qui disent le contraire confondent les premiers temps de l’islam et le régime islamique lui-même 78 ». En distinguant les préceptes de l’islam » des mises en œuvre historiques de ceux-ci, al-Bannā signifie qu’aucun exemple du passé, fût-il celui du prophète, ne peut se substituer à la réalisation d’un régime islamique » dans la conjoncture sociale égyptienne. Or celle-ci se modifie sans cesse, ce qui exige du militant une adaptation permanente aux circonstances. C’est pourquoi les Frères se caractérisent autant par une praxis que par une doctrine. 79 http // ?article19, consulté le 80 B. Maréchal, Les Frères musulmans en Europe. Racines et discours, Paris, Presses universitaires de ... 61Cette conception de l’action militante a profondément marqué toutes les organisations qui se rattachent peu ou prou aux Frères musulmans. C’est notamment le cas de l’Union des organisations islamiques de France. Le site internet de l’UOIF explique que la lecture de l’islam est une construction que les musulmans de France sont amenés à faire. Cette dernière varie en fonction des sociétés et des époques ; elle n’est ni importée ni décrétée. Si les principes religieux sont invariables quant à leurs finalités, la manière de les concevoir et de les appliquer diffère selon les sociétés 79 ». Des propos recueillis par la sociologique Brigitte Maréchal auprès d’un membre de l’UOIF illustrent comment la distinction entre finalités » et contingences historiques a été comprise par un militant de base J’pense que la base de cette idéologie, c’est justement la capacité à s’adapter. […] Donc… dans le contexte palestinien, ça va être de… faire exploser des… bombes. Et dans le contexte républicain français, c’est de… de parler de laïcité. Et c’est pas un double discours, si tu veux. C’est quelque chose qu’on vit… qu’on intègre 80. » L’articulation entre les associations nationales et une identité collective plus large 81 Cité d’après Amr Elshobaki, p. 23. 82 Pour une analyse détaillée de l’organisation interne des Frères, voir O. Carré, Croissance d’une ... 62Dans le Coran, la fraternité est un lien de solidarité unissant des personnes sur la base d’une parenté biologique ou d’une affinité sociale ou les deux à la fois. C’est par la grâce de Dieu » que, d’ ennemis » qu’ils étaient les uns pour les autres, les croyants sont devenus des frères » Q 3, 103. Ḥasan al-Bannā devait avoir ce verset en mémoire lorsqu’il a choisi d’appeler son organisation les Frères musulmans ». S’adressant au iiie Congrès des Frères en 1935, il en appelle explicitement au sentiment subjectif d’appartenance Ô Frères musulmans, nous sommes dans un congrès que j’appelle congrès de famille, le congrès de la famille des Frères musulmans 81 ». Pourtant, al-Bannā n’a pas fondé son groupe uniquement sur l’affectivité. En 1945, il fait adopter une ordonnance fondamentale » niẓām asāsī créant une structure hiérarchique placée sous l’autorité d’un Guide suprême », al-Bannā lui-même, qui contrôle les activités des sections », comités » et districts » par l’intermédiaire de deux organes principaux, le Bureau général et le Conseil constituant de l’orientation 82. 63En même temps qu’ils se constituent en une association nationale, les Frères égyptiens créent des succursales en Syrie et en Jordanie. Subordonnées initialement à la maison mère, ces nouvelles associations gagneront progressivement leur autonomie, tout en maintenant des liens informels avec les Frères égyptiens. Le succès de la révolution islamique en Iran, quoique d’inspiration shīᶜite, fournit l’impulsion à la création de nouvelles formations inspirées de la pensée des Frères dans les années 1980 et 1990. Ces organisations soulignent d’emblée leur indépendance par rapport aux Frères égyptiens en adoptant des appellations variées créé en 1981, le Mouvement de la tendance islamique tunisien devient, en 1989, Ennahda Al-Nahḍa — La Renaissance » ; en 1983, Necmettin Erbakan fonde le Parti de la prospérité Refah Partisi en Turquie, dont l’aile réformiste participera à la création du Parti pour la justice et le développement Adalet ve Kalkınma Partisi— AKP en 2001 ;le Hamas Ḥamās, ferveur », acronyme arabe du Mouvement de la résistance islamique en Palestine, est créé en 1987 ; au Maroc le Parti de la justice et du développement PJD naît en 1996 de la fusion de deux anciens partis. 83 Des structures organisationnelles », ibid., p. 51-61. 84 http // ?id=1&img=1., consulté le 85 http // consulté le 86 http // ?rubrique1., consulté le 87 http // consulté le 88 http // consulté le 89 http // consulté le 90 Manifeste pour un nouveau “nous”. Appel aux musulmans occidentaux, et à leurs concitoyens » http ... 64Mais c’est peut-être l’implantation des Frères musulmans en Europe qui le mieux illustre l’articulation entre groupes particuliers et identité collective. Dans son ouvrage sur les Frères musulmans en Europe, Brigitte Maréchal recense une dizaine d’associations à l’origine de la diffusion de la pensée de la confrérie dans les démocraties européennes 83. Ce qui frappe en visitant les sites internet de ces organisations en 2012, est l’absence de revendication d’appartenance aux Frères musulmans. Car ces associations mettent l’accent sur leur enracinement local. La Federation of Islamic Organisations in Europe souligne l’islam comme un élément intrinsèque et positif de la vie européenne 84 » ; la Muslim Association of Britain milite pour la promotion des enseignements et de la culture islamiques dans le Royaume-Uni 85 » ; l’UOIF défend l’intégration responsable et positive [de l’islam en France] 86 » ; l’Islamische Gemeinschaft in Deutschland soutient le travail pour la paix 87 » ; l’Institut européen des sciences humaines œuvre pour l’intégration positive des musulmans dans les sociétés européennes 88 ». Il n’y a guère que le Centre islamique de Genève qui affiche les mots Frères musulmans » sur sa page d’accueil 89, et encore ce lien hypertexte renvoie à un hommage posthume à son fondateur, Saïd Ramadan. Comment faut-il alors comprendre les relations qu’entretiennent ces organisations et les individus qui les représentent entre eux ? Relèvent-elles uniquement d’un sentiment subjectif d’appartenir à un nous » collectif, comme le voudrait Tariq Ramadan 90 ? Ou l’insistance sur les enjeux locaux et nationaux sert-elle plutôt à dissimuler la subordination hiérarchique des fédérations nationales UOIF, MAB, IGD à la Fédération des organisations islamiques en Europe FOIE, ou celle de l’Institut européen des sciences humaines au Conseil européen de la fatwa et de la recherche ? Plutôt, sociétisation et communautarisation apparaissent comme deux stratégies complémentaires permettant tantôt de renforcer la cohésion des groupes particuliers tantôt d’affirmer la portée universelle du mouvement. La régulation de la violence religieuse par l’État 65À l’échelle de l’histoire de l’islam, l’État, au sens d’une institution revendiquant le monopole de la violence légitime sur un territoire délimité, est d’invention récente. Son introduction dans l’espace musulman est liée au déclin du califat ottoman 1453-1924, dont la légitimité reposait sur sa prétention à poursuivre l’expansion géographique de l’islam. Au cours du xixe siècle, la Sublime Porte perd progressivement le contrôle de ses provinces africaines Égypte, Lybie, Tunisie, Algérie au profit de la Grande-Bretagne, de l’Italie et de la France. Conséquence de sa défaite lors de la Première Guerre mondiale, l’empire ottoman est amputé de ses provinces arabes Syrie, Palestine, Liban, Iraq, Arabie aux termes du traité de paix de Sèvres 1920, qui établit sur celles-ci des mandats britanniques et français. Au nom du nationalisme turc, Mustafa Kemal s’oppose à cet accord et obtient, avec le traité de Lausanne 1923, la reconnaissance de son pouvoir dans les frontières de la Turquie moderne. La République turque est proclamée le 29 octobre 1923. Le 3 mars 1924, le califat est aboli. La disparition de cette institution censée incarner la dimension universelle de l’islam consacre le transfert de la responsabilité de la régulation de la violence religieuse aux administrations coloniales. Cette territorialisation a encore été renforcée par l’avènement des États-nations issus de la décolonisation. Parallèlement, depuis la deuxième moitié du xxe siècle, des États situés en dehors de l’aire culturelle musulmane historique sont également concernés par le militantisme islamique du fait de la présence sur leur territoire d’immigrés musulmans et de leurs descendants. Je propose de distinguer schématiquement trois cas de figure que peuvent prendre la régulation étatique de l’islam en fonction de l’attitude que les États adoptent vis-à-vis de la religion des États revendiquant une double légitimité politique et religieuse, des États laïques et des États libéraux. États à double légitimité politique et religieuse 66Les constitutions de la plupart des États issus de la décolonisation des anciennes provinces de l’empire ottoman font de l’islam la religion de l’État. Afin de préserver et de promouvoir la religion musulmane, ces États construisent des mosquées, financent des universités islamiques, nomment des muftī-s, salarient des imams et, dans certains cas, déterminent le contenu des prônes de vendredi. Car il s’agit non seulement d’encourager des formes de religiosité censées consolider l’État, mais aussi de lutter contre celles accusées de diviser la population. Pendant la deuxième moitié du xxe siècle, nombre de dirigeants au Proche et au Moyen Orient comme au Maghreb ont justifié la mise en place de régimes autoritaires par la nécessité de lutter contre l’extrémisme religieux. À cette fin, des associations ont été dissoutes, des militants condamnés ou contraints à l’exile, des partis d’opposition muselés, des élections annulées ou reportées. Ce double monopole politique et religieux, qui s’appuyait sur la police, l’armée et les services de renseignements, aurait pu se maintenir encore longtemps si par ailleurs ces gouvernements avaient pu offrir à leurs administrés des conditions économiques satisfaisantes. Mais la faillite des politiques industrielle et agricole, la hausse des prix et le chômage de masse ont appauvri les classes moyennes urbaines, dont les revendications économiques ont été le point de départ des révoltes de 2011 connues sous l’appellation des printemps arabes ». 91 Le Monde, 14 juin 2012. 67En retrait par rapport aux manifestations qui ont renversé le régime de Hosni Moubarak ou celui de Zine El-Abidine Ben Ali, les Frères musulmans égyptiens et leurs homologues tunisiens d’Ennahda se sont révélés les formations politiques les mieux organisées et ont remporté les élections destinées à doter leurs pays respectifs de nouvelles institutions politiques. Loin de confirmer les prophéties de l’ancien dictateur qui promettait l’anarchie s’il devait partir, la mise en place d’un gouvernement Ennahda à Tunis témoigne de la recherche d’un compromis politique entre islamistes et laïques, aux dépens des salafistes. Disposant seulement d’une majorité relative à l’Assemblée constituante, Ennahda conclut une alliance avec deux partis de gauche aux termes de laquelle la présidence de la République revient au Congrès pour la République, celle de l’Assemblée constituante à Ettakatol, et la direction du gouvernement au parti islamiste. Pour donner des gages à ses partenaires laïques, Ennahda renonce à l’application de la sharīᶜa ; maintient l’article premier de la Constitution de 1959, qui stipule que le régime de l’État tunisien est la République ; et s’engage à inscrire dans la Constitution le Code du statut personnel, qui donne à la femme tunisienne des droits inégalés dans le monde arabe. Par ailleurs, le gouvernement instaure brièvement un couvre-feu à la suite d’affrontements entre salafistes et forces de sécurité, signifiant ainsi sa détermination à conserver le monopole de l’exercice de la violence légitime. Enfin, il prépare un projet de loi pour criminaliser l’atteinte au sacré » afin, selon le ministre des affaires religieuses, de faire respecter le peuple tunisien, sa dignité, sa civilisation et son histoire91 ». La construction d’un consensus politique, incluant les partis laïques mais excluant les formations religieuses qui recourent à la violence, sur la base de l’identité musulmane représente une ambitieuse tentative de renouveler la conception d’un État à double légitimité religieuse et politique. Il reste à démontrer que ce projet est compatible avec l’alternance politique, condition indispensable d’un État démocratique. États laïques 92 D. Hervieu-Léger, La religion en mouvement. Le pèlerin et le converti, Paris, Flammarion, 1999, p. ... 68Historiquement, l’État français s’est construit, en partie, en imposant son autorité aux organisations religieuses présentes sur son territoire, et singulièrement à l’Église catholique romaine. Philippe le Bel revendique le pouvoir exclusif en matière de taxation des églises ; François Ier obtient le droit de nommer aux principaux bénéfices ecclésiastiques ; la Constitution civile du clergé fait obligation aux prêtres de prêter serment au gouvernement. Devenu Premier Consul après le coup d’État du 18 brumaire, Napoléon Bonaparte cherche à se concilier les faveurs de la papauté. Le Concordat de 1801 reconnaît le catholicisme comme religion de la majorité des Français. Cependant, en y joignant unilatéralement les Articles organiques », Bonaparte étend la formule concordataire au protestantisme, organisant les consistoires luthériens et réformés et accordant un traitement aux pasteurs. Le judaïsme sera progressivement intégré à ce dispositif création des consistoires israélites en 1808, salarisation des rabbins en 1831. Ce système de cultes officiels traduit les préférences de l’État régulateur en ce qui concerne les organisations religieuses. Elles doivent être en nombre limité, centralisées et nationales. Et si la loi de 1905 interdit à l’État de subventionner les cultes, des dispositions ultérieures permettent aux pouvoirs publics de participer indirectement au financement des organisations religieuses de diverses manières baux emphytéotiques, garanties d’emprunt, exonérations fiscales, réparation d’édifices cultuels, confortant ce que la sociologue Danièle Hervieu-Léger décrit comme un système des religions reconnues en fait, sinon en droit92 ». 93 G. Kepel, La République et l’islam », Le Monde, 27 avril 1988 consulté le 4 jui ... 94 Selon une étude de l’Insee. publiée en 2011, la France compterait 2,1 millions de musulmans décla ... 69La nécessité d’intégrer l’islam dans le système des cultes tacitement reconnus est apparu aux yeux du législateur français à la fin du siècle dernier. En 1988, le politologue Gilles Kepel publie une tribune dans Le Monde dans laquelle il attire l’attention sur le développement spectaculaire de l’islam en France au cours des quinze dernières années », dénonce l’ abandon de souveraineté » au profit des puissances étrangères » et des organisations transnationales islamiques », et appelle à la création d’une instance représentative » de l’islam en France afin de favoriser une acceptation de cette religion qui s’harmonise avec nos institutions laïques 93 ». Cette recommandation s’appuie sur les trois éléments constitutifs de la régulation étatique de la religion en régime laïque un pluralisme religieux restreint, qui inclurait désormais l’islam en raison de l’importance démographique de la population musulmane 94 ; une instance centralisée, interlocutrice des pouvoirs publics auprès des associations musulmanes ; et enfin, la promotion d’un islam à caractère national. À partir de 1990, tous les gouvernements, de gauche comme de droite, ont cherché à encadrer et à institutionnaliser la pratique du culte musulman. Ces efforts ont abouti à la création, en 2003, du Conseil français du culte musulman. Voulu par les pouvoirs publics, le CFCM a certes démontré sa loyauté républicaine en condamnant le terrorisme islamiste et en cautionnant les restrictions imposées à l’expression de la foi musulmane dans l’espace public. Cependant, il pâtit d’un déficit de légitimité que l’on peut attribuer à trois facteurs principaux sa présumée subordination à l’État français, le rôle prépondérant des fédérations proches des pays d’émigration Maroc, Algérie, Turquie et la perception que les membres du CFCM sont des notables coupés de la réalité sociale de l’islam des cités. États libéraux 95 John Locke, Lettre sur la tolérance, texte latin établi par R. Klibansky, traduction française par ... 96 Lettre sur la tolérance, p. 15. 70La régulation étatique des religions n’est pas la seule réponse possible à la menace que celles-ci peuvent représenter pour l’ordre social. Alors que calvinistes, catholiques et anglicans s’affrontent pour conquérir le pouvoir en Angleterre, John Locke 1632-1704 recommande non le contrôle du religieux par le politique, mais la séparation de ces deux sphères afin de respecter la spécificité de chacune. À la première le soin des âmes, à la deuxième la protection des biens civils le corps, les biens meubles et immeubles, l’argent toute la juridiction du magistrat concerne uniquement ces biens civils […] le droit et la souveraineté du pouvoir civil se bornent et se limitent à conserver et à promouvoir ces biens-là seulement […] ils ne doivent ou ne peuvent en aucune façon s’étendre au salut des âmes 95 ». La séparation de l’État et de l’Église repose sur une division toute aussi rigoureuse des prérogatives de chacun. À l’État le monopole de la coercition physique, à l’Église le pouvoir de persuasion Chaque mortel a la charge d’avertir, d’exhorter, de dénoncer les erreurs et de mener les autres à ses propres idées par des arguments ; mais il appartient en propre au magistrat d’ordonner par des édits et de contraindre par le glaive. Voici ce que je veux dire le pouvoir civil ne doit pas prescrire des articles de foi par la loi civile, qu’il s’agisse de dogmes ou de formes du culte divin 96 ». 97 Lettre sur la tolérance, p. 57-59. 98 James Madison, The Structure of the Government Must Furnish the ProperChecks and Balances between ... 71En refusant au magistrat le droit de légiférer en matière de croyance et de pratique religieuses, Locke délivre l’État du devoir de déterminer la vérité. Mais n’est-il pas à craindre une prolifération d’organisations religieuses nuisibles à l’ordre social ? Locke répond à cette objection en affirmant que la suppression des libertés publiques représente un plus grand danger que les agissements des sectes 97. Grand lecteur de Locke et l’un des auteurs principaux de la Constitution des États-Unis, James Madison 1751-1836 voit même dans la pluralisation des organisations religieuses la meilleure garantie contre la domination de l’une d’entre elles Sous un gouvernement libre, la sauvegarde des droits civiques procède du même principe que celle des droits religieux. Dans le premier cas, elle réside dans la multiplicité d’intérêts ; dans le deuxième, dans la pluralité des sectes 98 ». Certes, ni Locke ni Madison n’emploie le mot secte » au sens technique de sociétisation à fondement contractuel. Il est néanmoins frappant de constater que la pluralisation des sectes, en quoi Madison voit la source de la liberté religieuse, a pour effet de renforcer la particularité des groupes religieux locaux au détriment de leur visée universelle. Autrement dit, plus les groupes religieux prendront la forme d’associations particulières et plus elles seront nombreuses, moins elles pourront prétendre imposer leur idéal religieux à la collectivité, à la manière d’une Église ou d’un mouvement. 99 M. Moussaoui, Pour le droit du culte musulman en France à l’indifférence », Le Monde, 11 février ... 100 Communiqué UOIF et Mosquée de Paris » du 29 mai 2012 http // ?ar ... 72Le désengagement de l’État du champ religieux peut-il représenter une alternative à l’interventionnisme des pouvoirs publics dans l’organisation du culte musulman en France ? Trois considérations permettent de le penser. La première tient à ce que l’islam, religion sans autorité centrale, a toujours été travaillé par des forces centrifuges donnant naissance à des groupes autonomes ; loin de tarir, cette créativité associative se renforce en régime démocratique reconnaissant la liberté de réunion. Plutôt qu’une menace à conjurer, la pluralité musulmane serait une source de liberté, religieuse et politique. Le deuxième argument qui incite à penser que l’État français pourrait moins intervenir dans les affaires internes des musulmans est qu’il existe déjà un cadre légal régissant les rapports entre les associations religieuses et l’État. Selon l’article 20 de la loi de 1905, les Églises ne sont plus de droit public, mais peuvent avoir une existence de droit privé, en prenant la forme d’associations. En tant qu’associations, les groupes religieux sont soumis aux lois communes qui reposent en dernier lieu sur le monopole de la force physique détenu par l’État ; en tant que communautés religieuses, elles sont libres de s’organiser selon leurs principes propres, sans que l’État puisse leur dire comment il faut croire et pratiquer. Le troisième raison qui plaide pour une libéralisation de la politique de l’État français envers les acteurs religieux musulmans est que ces derniers en sont demandeurs. Dans une tribune publiée par Le Monde, le président du CFCM, Mohamed Moussaoui Rassemblement des musulmans de France, réclame le droit du culte musulman en France à l’indifférence », ce par quoi il entend que la pratique religieuse [des musulmans] soit perçue comme un élément de leur liberté individuelle, plutôt qu’une source permanente de débats publics dont certains peuvent contribuer, malheureusement, à nourrir une forme de stigmatisation 99 ». Dans une initiative distincte, non dénuée certes d’arrière-pensées, deux autres membres du CFCM, Ahmed Jaballah UOIF et Dalil Boubakeur Grande Mosquée de Paris se sont associés pour affirmer que toute organisation du culte musulman ne peut s’effectuer que par les musulmans eux-mêmes, sans ingérence aucune 100 ». * ** 73Le prophète Muḥammad a prêché un idéal de paix salām dont la réalisation, dans l’au-delà comme dans l’ici-bas, dépend de l’établissement de la religion que Dieu a prescrite pour les hommes islām. La lutte jihād, qitāl qu’il a menée pour faire triompher la foi sur la mécréance relevait ordinairement de la persuasion morale, plus exceptionnellement de la coercition physique. Toutefois, l’emploi de la force n’a jamais été pour Muḥammad qu’un moyen au service du but qu’il a inlassablement poursuivi, et il a su, à des moments décisifs, suspendre les hostilités afin de donner une chance supplémentaire à la prédication. Ainsi se dégage de la période prophétique une triade — guerre, paix et trêve — dont le troisième terme correspond à une étape transitoire entre l’état polémique et la victoire ultime de l’islam. 74La figure de la trêve témoigne de la volonté du groupe religieux musulman originaire de changer la société environnante pour la faire correspondre à ses normes et valeurs, mais aussi de l’acceptation que son idéal ne peut devenir réalité sans la médiation des conditions historiques qui influent à leur tour sur la forme particulière que prendra le groupe. Le concept de routinisation du charisme prévoit que la communauté religieuse première subisse, sous la pression des conditions économiques quotidiennes, un processus de sociétisation qui la transforme soit en institution, soit en association. Dans le premier cas, l’Église atténue la rigueur de sa prédication afin de s’incorporer à la société. Dans le second cas, la secte affirme sa singularité aux dépens de l’universalité de son message. Ce modèle théorique rend difficilement compte de la capacité de l’islam des origines à concilier exigences religieuses et extension démographique. Ni Église ni secte, le groupe des disciples du prophète Muḥammad peut mieux se concevoir comme un mouvement. Ce type d’organisation religieuse se caractérise par la référence à une représentation idéale de société qui unit les adeptes dans un rapport subjectif à une communauté imaginaire et imaginée et les pousse à lutter collectivement pour le contrôle des ressources symboliques et matérielles permettant de modifier l’ordre social. La tension entre l’idéal religieux dont le mouvement est porteur et les conditions historiques de sa mise en œuvre obligent celui-ci à s’adapter continuellement aux conjonctures sociales. Cette tension se reflète notamment dans l’articulation entre des organisations locales et nationales chargées de la défense d’intérêts particuliers et le mouvement dans son ensemble, source d’identité collective. 75Pendant plus d’un millénaire, la régulation interne de la violence religieuse dans l’islam a été assurée en grande partie par des spécialistes privés du savoir religieux, les ᶜulamā’. Cette monopolisation du travail religieux a été contestée à partir de la fin du xixe siècle par des non-clercs, inquiets de l’extension de l’influence occidentale dans le monde musulman. Parmi les groupes issus de cette réforme » iṣlāḥ de l’islam, celui des Frères musulmans, par sa promotion d’un modèle de société inspiré du Coran et de la Sunna, sa volonté de conquérir le pouvoir politique et sa diffusion par filialisation à l’échelle planétaire, se montre justiciable d’une analyse sous la forme de type-mouvement. Or, l’essor des Frères musulmans correspond à l’émergence dans le monde musulman d’un nouvel acteur de la régulation de la violence religieuse l’État. Par sa prétention à exercer le monopole de la violence légitime, celui-ci tente de priver les acteurs religieux du recours à la coercition physique. Quant à l’utilisation de la violence symbolique, trois attitudes sont à distinguer. Les États à double légitimité religieuse et politique s’identifient à une religion qu’ils cherchent à promouvoir et à contrôler ; les États laïques s’efforcent de réduire l’expression religieuse dans l’espace public, qui tend à se confondre avec l’espace politique ; les États libéraux ne revendiquent pas le monopole de l’exercice de la violence symbolique et laissent les groupes religieux développer leur propagande, à la condition expresse qu’ils se soumettent à la loi commune. La mondialisation de l’islam offre la possibilité de tester in situ l’efficacité de ces trois philosophies politiques à préserver la paix. Haut de page Notes 1 Le système de transcription de l’arabe est celui généralement employé dans les publications à caractère scientifique. La hamza, qu’elle soit de liaison ou de coupure, n’est jamais notée en position initiale āya, et non ’āya ; l’absence d’ellipse devant un terme technique ou un nom propre arabe indique la présence d’une hamza de coupure la umma, et non l’umma. Pour la période contemporaine, la graphie des noms propres est celle du journal Le Monde. 2 Cet opuscule d’apologétique chrétienne rédigé en grec à Carthage dans les années 640, soit une dizaine d’années après la mort de Muḥammad, déclare à son sujet C’est un faux prophète les prophètes viennent-ils armés de pied en cap ? » Doctrina Jacobi, V, 16, éd. et trad. V. Déroche, cité d’après de Prémare, Les Fondations de l’islam. Entre écriture et histoire, Paris, Seuil, 2002, p. 149. 3 Publiées pour la première fois le 30 septembre 2005 dans le quotidien danois Jyllands-Posten, ces caricatures, dont l’une représentait Muḥammad affublé d’un turban en forme de bombe, la mèche allumée, firent le tour du monde, suscitant des réactions parfois violentes de la part de musulmans qui les jugeaient blasphématoires. 4 La violence symbolique est cette coercition qui ne s’institue que par l’intermédiaire de l’adhésion que le dominé ne peut manquer d’accorder au dominant […] », écrit Pierre Bourdieu Méditations pascaliennes, Paris, Seuil, 1997, p. 204. 5 L’arabe considère les participes, actifs et passifs, ainsi que les adjectifs qualificatifs comme des noms. 6 D’après Hanna E. Kassis, A Concordance of the Qur’ân, Berkeley, University of California Press, 1983, p. 1077-1081. 7 Le classement chronologique des sourates en quatre périodes, trois makkoises et une médinoise, proposé par Gustav Weil 1844 et repris, à quelques différences près, par Theodor Nöldeke Nöldeke et Schwally 1961 et Régis Blachère 1959 a récemment été conforté par l’analyse quantitative des données textuelles du corpus coranique effectuée par Nora K. Schmid Quantative Text Analysis and its Application to the Qur’an Some Preliminary Considerations », dans A. Neuwirth, N. Sinai and M. Marx éd., The Qur’ān in Context. Historical and Literary Investigations into the Qur’ānic Milieu, Leiden, Brill, 2010, p. 441-460. 8 Sauf indication, les citations du Coran reproduisent la traduction de Denise Masson Le Coran, Paris, Gallimard, 1967. 9 D. Masson donne une solennité particulière à cette phrase en traduisant un mot arabe, salām », par deux mots français, Paix » et Salut ». 10 J’ai modifié la traduction de D. Masson pour tenir compte des remarques philologiques que je développe ci-après. 11 C’est en ce sens que l’on peut parler de la sacralité de la vie dans l’islam, même si le Coran se garde de diviniser l’homme. 12 Notre verset en mentionne un l’homicide, qui donne à l’agnat solidaire walī. un droit à la vengeance. Mais la plupart des savants religieux ᶜulamā’ en reconnaissent deux autres l’adultère et l’apostasie. 13 Du nom d’un lieu-dit entre Minā et Makka, à l’intérieur de l’enceinte sacrée. 14 Ibn Isḥāq, Al-Sīrat al-nabawiyya, édition d’Ibn Hishām [m. en 213 ou 218/828 ou 833], texte établi par Muṣṭafā al-Saqqā, Ibrāhīm al-Abyārī, ᶜAbd al-Ḥafīẓ Shalabī, Beyrouth, Dār al-Khayr, 1410/1990, tome ii, p. 84. Désormais Sīra. Les traductions de la Sīra sont personnelles. 15 Sīra, ii, p. 63. 16 Sīra, ii, p. 64. 17 Sīra, ii, p. 64. 18 Sīra, ii, p. 185. 19 Sīra, ii, p. 185. 20 La datation de cette sourate, qui contient également le verset autorisant le combat, est problématique. Si l’exégèse traditionnelle la tient pour makkoise, la critique historique, elle, la considère comme une des dernières à être révélée à Médine. R. Blachère Le Coran al-Qor’ân, Paris, Maisonneuve et Larose, 1980, p. 356, qui se rallie in fine à cette dernière opinion, estime cependant que le problème reste entier de savoir pourquoi des révélations datant de 628 se trouvent avoir pris place parmi des révélations antérieures de plusieurs années ». 21 Ce rapprochement est attesté par la quasi équivalence des formules qātala fī sabīli llahi », combattre dans le chemin de Dieu » Q 2, ; 3, 167 ; 4, 84, et jāhada fī sabīli llahi », lutter dans le chemin de Dieu » Q 2, 218 ; 4, 95 ; 5, ; 8, 74 ; 9, ; 61, 11. 22 H. Fleisch, Les Verbes à l’allongement vocalique interne en sémitique. Étude de grammaire comparée., Paris, Université de Paris, 1944, p. 418. 23 Abū Jaᶜfar Muḥammad ibn Jarīr al-Ṭabarī m. 310/923, Jāmiᶜ al-bayān ᶜan tā’wīl āyī l-Qur’ān, The Aal al-Bayt Foundation for Islamic Thought, http // à ce verset page consultée 24 Sociologie du conflit, Paris, Presses universitaires de France, 1983, p. 14. 25 L’affaire de la mosquée nuisible » masjid al-ḍirār — Q 9, 107-109 offre l’exemple de la répression sanglante d’un schisme naissant. 26 Parmi les ennemis extérieurs figurent deux grandes tribus arabes, Quraysh, jusqu’à la reddition de Makka en 8/630, et Thaqīf, jusqu’à son ralliement en 9/630, ainsi que les trois principales tribus juives de Médine les Banū Qaynuqāᶜ, expulsés en 2/624, les Banū Naḍīr, contraints à l’exil en 4/625, et les Banū Qurayẓa, dont les hommes furent passés au fil de l’épée en 5/627. 27 Dans une sourate makkoise Q 25, 52, le locuteur divin exhorte son messager à lutter contre [les incrédules], avec force, au moyen de ceci [le Coran] ». 28 Sīra, ii, p. 186. 29 Traduction personnelle. 30 Sīra, iv, p. 136-140. 31 Ce texte nous est parvenu dans deux recensions, celle d’Ibn Isḥāq, dans la Sīra ii, 110-112, et celle de Abū ᶜUbayd m. 224/838, dans son Kitāb al-amwāl. Ces deux versions ont récemment été éditées et commentées par M. Lecker The “Constitution of Medina” Muhammad’s First Legal Document, Princeton, Darwin Press, 2004, p. 5-39. 32 C’est notamment la thèse développée par G. Kepel dans deux ouvrages, Le Prophète et Pharaon. Les mouvements islamistes dans l’Égypte contemporaine Paris, La Découverte, 1984 et Jihad. Expansion et déclin de l’islamisme Paris, Gallimard, 2000. 33 Fī l-niẓāmi l-siyāsī li-l-dawlati l-islāmiyya [ Sur le système politique de l’État islamique »], sixième édition, Le Caire, al-Maktab al-Miṣr al-ḥadīth, 1983. 34 Nous entendons par État une “entreprise politique de caractère institutionnel” [politischer Anstaltsbetrieb] lorsque et tant que sa direction administrative revendique avec succès, dans l’application des règlements, le monopole de la contrainte physique légitime » Économie et société, traduit de l’allemand sous la direction de J. Chavy et d’É. de Dampierre, Paris, Plon, 1995, tome 1, Les catégories de la sociologie, p. 97 ; ici et partout ailleurs, la mise en italique des traducteurs remplace le procédé d’espacement utilisé par Weber pour mettre un mot en relief. Désormais ÉS. 35 Sīra, iii, p. 241. 36 Sīra, iii, p. 242. 37 Sīra, iii, p. 242. 38 Sīra, iii, p. 247. 39 Sīra, iii, p. 248. 40 Sīra, iii, p. 248. 41 Sīra, iii, p. 251. 42 Traité de polémologie, Paris, Payot, 1970. 43 Production de la société, Paris, Seuil, 1973, p. 347. 44 A. Touraine dir., Mouvement sociaux d’aujourd’hui. Acteurs et analystes, Éditions ouvrières, 1982, p. 11. 45 A. Touraine, M. Wieviorka et F. Dubet, Le mouvement ouvrier, Paris, Fayard, 1984, p. 53. 46 Touraine, Wieviorka, Dubet, ibid., p. 64-65. 47 Ces écrits ont été édités, traduits et présentés par Grossein sous le titre L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme suivi d’autres essais Paris, Gallimard, 2003. Désormais ÉP. 48 “Églises” et “sectes” en Amérique du Nord. Une esquisse de politique ecclésiale et sociale » [1906], ÉP, p. 266. 49 ÉP, p. 268. 50 ÉP, p. 269. 51 ÉP, p. 269. 52 ÉP, p. 269. 53 Intitulé simplement Gemeinde », ce texte constitue la section 5 du chapitre d’Économie et Société consacré à la sociologie des religions ÉS, ii, p. 204-211, d’où le titre Communauté émotionnelle » que lui ont donné les traducteurs travaillant sous la direction de J. Chavy et d’É. de Dampierre. Sur la datation de ce texte, ainsi que des problèmes posés par sa traduction, voir la discussion de Grossein Max Weber, Sociologie des religions, textes réunis, traduits et présentés par Grossein, Paris, Gallimard, 1996, p. 92 — désormais SR.. 54 ÉS, ii, p. 204. 55 ÉS, ii, p. 206. 56 Les termes de communautarisation » Vergemeinschaftung et de sociétisation » Vergesellschaftung renvoient évidemment à la distinction opérée par Ferdinand Tönnies entre communauté » Gemeinschaft et société » Gesellschaft. Cependant, à la différence de son aîné, Weber ne pense pas ces catégories comme des classifications taxonomiques mais comme des orientations idéaltypiques pouvant être présentes à des degrés différents dans toute relation sociale. 57 ÉS, ii, p. 204. 58 ÉS, ii, p. 209. 59 ÉS, i, p. 301. 60 ÉS, i, p. 291. 61 ÉS, i, p. 325. 62 E. Troeltsch, Die Soziallehren der christlichen Kirchen und Gruppen, Gesammelte Schriften, Erster Band, Aalen, Scientia, 1961. [ Les enseignements sociaux des Églises et groupes chrétiens », ouvrage non traduit intégralement en français]. Désormais Soziallehren. Les traductions des Soziallehren sont personnelles. 63 Soziallehren, p. 377. 64 Soziallehren, p. 803. 65 Soziallehren, p. 805. 66 Soziallehren, p. 205. 67 Soziallehren, p. 848-942. 68 Soziallehren, p. 967. 69 Weber ÉS, ii, p. 205 note en passant que les communautés émotionnelles mystagogiques » restent le plus souvent à l’état de communautarisation, mais il ne développe guère cette idée. 70 É. Durkheim, Les Formes élémentaires du la vie religieuse. Le système totémique en Australie, Paris, 2008 rééd., p. 60. 71 Freund, Sociologie du conflit, p. 65. 72 Comme l’observe à juste titre B. Anderson, au-delà des villages primordiaux où le face-à-face est de règle et encore…, il n’est de communauté qu’imaginée [imagined communities.] » L’Imaginaire national. Réflexions sur l’origine et l’essor du nationalisme, traduit de l’anglais par Dauzat, Paris, La Découverte, 2002 [1983], p. 20. 73 Cf. L’État et la hiérocratie » SR, p. 252 et 286 et Considération intermédiaire » SR, p. 428. 74 Ce terme désigne ici ceux qui ne font pas partie du clergé. 75 Cité d’après Amr Elshobaki, Les Frères musulmans des origines à nos jours, Paris, Éditions Karthala, 2009, p. 25. 76 The Muslim Brotherhood. Hasan al-Hudaybi and ideology, London and New York, Routledge, 2009, p. 13. 77 Sur ce texte, sa composition et sa réception, voir l’analyse de Barbara H. E. Zollner, p. 64-145. 78 Cité d’après Amr Elshobaki, ouvrage cité, p. 25 79 http // ?article19, consulté le 80 B. Maréchal, Les Frères musulmans en Europe. Racines et discours, Paris, Presses universitaires de France, 2009, p. 156. 81 Cité d’après Amr Elshobaki, p. 23. 82 Pour une analyse détaillée de l’organisation interne des Frères, voir O. Carré, Croissance d’une organisation 1930-1950 » dans O. Carré et G. Michaud, Les Frères musulmans 1928-1982, Paris, Gallimard, 1983, p. 21-34. 83 Des structures organisationnelles », ibid., p. 51-61. 84 http // ?id=1&img=1., consulté le 85 http // consulté le 86 http // ?rubrique1., consulté le 87 http // consulté le 88 http // consulté le 89 http // consulté le 90 Manifeste pour un nouveau “nous”. Appel aux musulmans occidentaux, et à leurs concitoyens » http // consulté le 91 Le Monde, 14 juin 2012. 92 D. Hervieu-Léger, La religion en mouvement. Le pèlerin et le converti, Paris, Flammarion, 1999, p. 247. 93 G. Kepel, La République et l’islam », Le Monde, 27 avril 1988 consulté le 4 juin 2012. 94 Selon une étude de l’Insee. publiée en 2011, la France compterait 2,1 millions de musulmans déclarés », de 18 à 50 ans. La sollicitude de l’État dont bénéficie » le culte musulman est à comparer à l’hostilité des pouvoirs publics à l’égard des religions ultra-minoritaires, telles que les Témoins de Jéhovah ou la Scientologie. 95 John Locke, Lettre sur la tolérance, texte latin établi par R. Klibansky, traduction française par R. Polin, Paris, Presses universitaires de France, 2006, p. 11. Désormais Lettre sur la tolérance. 96 Lettre sur la tolérance, p. 15. 97 Lettre sur la tolérance, p. 57-59. 98 James Madison, The Structure of the Government Must Furnish the ProperChecks and Balances between the DifferentDepartments », The Federalist Papers, N° 51 http // page consultée le Traduction personnelle. 99 M. Moussaoui, Pour le droit du culte musulman en France à l’indifférence », Le Monde, 11 février 2010, p. 17. 100 Communiqué UOIF et Mosquée de Paris » du 29 mai 2012 http // ?article1297, consulté le 6 juin 2012.Haut de page Pour citer cet article Référence papier Jason Dean, L’islam comme mouvement », Revue des sciences religieuses, 86/4 2012, 413-453. Référence électronique Jason Dean, L’islam comme mouvement », Revue des sciences religieuses [En ligne], 86/4 2012, mis en ligne le 15 octobre 2014, consulté le 27 août 2022. URL ; DOI de page Auteur Jason Dean Chercheur associé au Centre de sociologie des religions et d’éthique sociale CSRES Faculté de théologie protestante - Université de StrasbourgHaut de page Droits d'auteur Tous droits réservésHaut de page Quel était le comportement du sceau des prophètes Mohamed, paix et salut sur lui, avec ses proches et ceux qui le croisait ? C’est un sujet si large tant il était en contact avec énormément de personnes dans sa vie conjugale, sociale, et politique, qu’un seul article ne saurait englober dans les moindres détails le superbe caractère qu’il avait. Ce sont les traits d’un comportement qu’Allah Lui-Même qualifié de “grandiose” dans le verset de la sourate. Des nobles aspects de son comportement unique nous allons énumérer des actes aimés de lui et des habitudes qui pourront sembler être des généralités pour certaines personnes mais qui resteront à jamais des objectifs de vie à atteindre pour toute une communauté. Que chacun de vous lise ces quelques lignes, en se posant quelques questions. Que celles qui reviennent le plus parmi vos interrogations soient par exemple Est-ce que je fais pareil par amour pour lui ?Est-ce que j’essaie de lui ressembler ?Est-ce qu’il y a quelque chose que je peux modifier en moi pour atteindre ce haut niveau de comportement ? Nous sommes d’accord, le prophète, que la paix et le salut d’Allah soient sur lui, était le sceau des prophètes, d’une constitution parfaite car lavé de tous défauts humains. C’est un fait mais son amour pour nous alors qu’il ne nous a pas encore vus ne vaut-il pas la peine d’essayer de lui ressembler ? En effet, d’après Anas Ibn Malik, qu’Allah l’agrée, le prophète Mohamed, paix et salut sur lui, a dit J’aurais aimé rencontrer mes frères ! » Les compagnons lui demandèrent Ne sommes-nous pas tes frères ? » Et il, paix et salut sur lui répondit Vous êtes mes Compagnons et mes frères sont ceux qui croiront en moi sans m’avoir jamais vu ». Rapporté par Ahmed Voici la liste de caractères pour nous inspirer de lui, paix et salut sur lui. 65 traits de comportements généraux du prophète Mohamed Il était la meilleure personne ayant foulé la Terre et la plus facile à vivre. Il ne fronçait jamais les sourcils et ne montrait jamais des signes d’agacementSon rire était plus un sourire qu’un rireIl ne se faisait jamais servirIl ne mangeait jamais rien sans partager avec quelqu’unIl ne rabaissait ni ne blessait personneIl était au service des autresIl se portait toujours volontaire pour effectuer les tâches que tout le monde refusaitIl ne faisait jamais de reproches pourquoi as-tu ou n’as-tu pas…?Il ne refusait jamais ce qu’on lui demandait tant que cela ne transgressait pas les Lois d’Allah Une petite fille le tirait par la main sans lui dire où elle voulait le conduire, il la suivait jusqu’à sa satisfaction et revenait sur ses pas quand elle avait fini. Une femme le tirait par le pan de son vêtement pour lui poser une question à l’écart ?car il ne touchait jamais les femmes qui lui étaient interdites il se laissait tirer, répondait et revenait. Paix et salut sur lui !Il était le plus généreux de tous notamment pendant le mois de RamadanSi un pauvre lui demandait quelque chose il la lui donnait et s’il n’avait rien à donner, il lui demandait de l’attendre et revenait avec quelque Il était doux et tolérant avec les enfantsIl fermait les yeux sur les défauts et ce qui déplaisait ou l’agaçaitIl ne se mettait en colère que pour les droits d’Allah et jamais les siensIl était le plus humble dans sa manière de parler, de marcher, de s’asseoirSon regard était toujours plus tourné vers le sol que le cielIl était pudiqueLorsqu’il se tournait il le faisait de tout son corps et pas seulement qu’avec son visage car c’est un signe d’arrogance et d’orgueilIl était toujours pensif, et réfléchissait beaucoupIl gardait de longs moments le silenceIl ne parlait que pour dire des choses utiles ou méritoires ou pour améliorer l’état d’une personne, d’une chose. Juste des paroles qui peuvent apporter une récompense d’Allah, comme nous le rappelle son Hadith Tradition prophétique “Dis du bien ou garde le silence.”Il était le premier à saluer quand il rencontrait quelqu’unIl ne lâchait pas la main de quelqu’un avant qu’il ne la lui lâche après un salutIl ne se moquait jamais de personneIl ne s’affalait pas en s’asseyant mais gardait sa dignitéLe dhikr, la mention d’Allah, ne quittait pas sa bouche, en se levant ou en s’asseyant il mentionnait AllahIl parlait de manière concise et précise, toujours avec un but précisRien de la Douniya de la vie mondaine ne l’énervait ou l’insupportait tant elle ne valait rien à ses yeuxIl se montrait extrêmement reconnaissant même face à un mimine bienfait, ou une minuscule faveur Il ne parlait jamais brusquement, nerveusement Il ne faisait l’éloge de personne, n’était jamais vulgaire, et ne médisait jamais sur qui que ce soitIl faisait ressentir à Ses Compagnons qu’ils étaient les plus chers à ses yeuxPlus un mal était grand plus le bien qu’il rendait était encore plus grandIl faisait comme s’il ne voyait pas les défauts des autres 36. Il faisait passer les besoins avant les siens même lorsque les siens étaient plus urgents 37. Il honorait et s’occupait des orphelins 38. Il donnait de ce qu’il aimait le plus 39. Il honorait les amis de son épouse défunte et leur envoyait des cadeaux 40. Il honorait ses voisins 41. Il répandait le bonheur et les sourires autour de lui 42. Il priait en bien pour ses ennemis dans l’espoir que leur descendance devienne musulmane 43. Il était toujours optimiste et ne faisait jamais désespérer personne 44. Il s’était écarté de trois choses les polémiques, l’abondance ou l’abus de quoi que ce soit, et e ce qui ne le regardait pas 45. Il ne cherchait jamais à connaître la vie privée des gens 46. Il s’étonnait quand ses compagnons s’étonnaient 47. Il riait quand ses compagnons riaient 48. Quand un étranger était parmi eux, il le faisait se sentir comme un membre d’entre eux 49. Il n’interrompait jamais quelqu’un qui parlait, peu importe son temps de parole 50. Il n’acceptait pas les éloges 51. Il ne faisait rien sans mentionner Allah 52. Il ne se réservait jamais de place spécifique et s’asseyait là où il y avait une place de libre 53. Il se mêlait aux gens et se confondait parmi eux, même pour enseigner quelque chose à tel point que si quelqu’un arrivait de loin il devait demander lequel d’entre eux était Mohamed 54. En sa compagnie, chacun pensait être son préféré tant il prenait soin de chacun 55. Il saluait ses compagnons avec la formule musulmane de salut “as Salam alikoum” même s’ils se retrouvaient après avoir été séparés par un arbre 56. Il ne réservait son indexe que pour le Tachahoud de la prière et ne pointait donc personne du doigt. Il préférait plutôt indiquer quoi que ce soit de sa pleine main droite 57. Quand il s’étonnait il retournait ses deux paumes de mains vers le ciel 58. Il ne disait jamais “Ouff” et ne soupirait jamais d’agacement 59. Il ne se posait jamais pour se reposer ou profiter du temps libre car il était soit au service de sa famille, soit actif au service de sa communauté, soit en adoration 60. Il répondait “labbayk” lorsque un membre de sa famille ou un de ses compagnons l’appelait. Et c’était là un signe d’humilité 61. Lorsqu’il voyait quelqu’un énervé il demandait “pourquoi son front est-il plissé ?” 62. Il donnait des conseils doux et bienveillants en s’adaptant à chaque personne qui était en face de lui 63. Il faisait savoir à sa famille ou à ses compagnons qu’il les aimait 64. Il était très attentif aux petits détails dans les émotions de ses proches 65. Dès qu’un événement le troublait il accourait en prières Le plus noble des prophètes d’Allah, que la paix et le salut du Tout Miséricordieux soient sur lui, nous a laissé un code de conduite pour nous guider durant toute notre vie si seulement nous lui accordions plus de temps. L’aimer est une chose, prier sur lui avec les formules de salutations que le Seigneur nous a demandé d’employer et que lui-même nous a appris à dire est un grand bienfait mais quand est-il de notre volonté à nous surpasser pour nous rapprocher de ce qu’il nous a enseigné ? Ces rappels sur le comportement de notre noble prophète Mohamed, salla Allah alyhi wa salam, doivent nous servir de fil conducteur toute notre vie dans l’espoir de faire partie des personnes dont il sera fier le Jour de la Résurrection. Qu’Allah nous accorde d’en faire partie Amin. Vous avez aimé ce rappel ? Partagez le autour pour que se propage l’amour du prophète, sallaLah alayi wa salam ! Source Tirés de recueil de hadiths Et Omar Abd Al Kafi

le prophete mohamed paix et salut sur lui